La bibliothèque de l'amateur d'art
par Gérard-Georges Lemaire
Chemin de Croix biblique, tableaux de Sergio Birga, père Romuald Fresnais, préfacez de Mgr Jean-Louis Brugès, Pierre Téqui éditeur, 32 op., 6 €.
Depuis quelques années, Sergio Birga, en parallèle à son œuvre profane, se consacre avec beaucoup de conviction à une œuvre religieuse. Il vient de réaliser un nouveau chemin de Croix pour la chapelle du collège lycée Notre-Dame d’Orveau. D’aucuns peuvent croire que le chemin de Croix est un mode de représentation préétabli. Bien sûr, il y a des étapes incontournables. Mais l’artiste peut très bien choisir des moments de la Passion du Christ. Par exemple, il ne montre pas la scène où Jésus tombe une nouvelle et demande l’aide d’un savetier qui refuse de l’aider à se relever : cette scène fondamentale puisqu’elle est à l’origine de la terrible légende du Juif errant. En revanche, il a choisi de représenter Jésus et les femmes de Jérusalem. Ces quatorze tableaux sont en partie inspirés de la Renaissance, puisqu’il mêle les costumes d’époques des Romains et des Juifs, mais aussi des costumes de religieux de notre époque. C’est ce qui rend si émouvant son travail, qui, comme ses illustres prédécesseurs, conjugue l’ancien et le moderne. Mais il ne verse ni dans une nostalgie stérile de l’art ancien, ni n’abonde dans le sens de la provocation à outrance de certains artistes de l’art contemporain
II Littératures et philosophies
R.U.R., Karel Capek, traduit du tchèque par Jan Rubes, préface de Brigitte Minier, « Minos » La Différence, 224 p., 8 €.
Cette pièce, écrite par le jeune écrivain tchèque Karel Capek en 1920, Rossum’s Universal Robots, a fourni à l’humanité un mot nouveau : « robot ». Mais l’intérêt de cette œuvre théâtrale va bien au-delà de cette curiosité linguistique. Elle a connu un certain retentissement en Europe (elle a été représentée à Paris en 1924 au Théâtre des Champs-Elysées) parce qu’elle a été une des grandes méditations sur le nouveau monde industriel et ses possibles conséquences. La production de masse de robots intelligents et aux différentes fonctions peut faire croire à un immense progrès libérant l’homme de l’asservissement au travail. Mais ces robots inventés par le professeur Rossum ne sont pas des machines comme l’avaient imaginé les futuristes italiens : ce sont des êtres organiques et intelligents. Par la suite, la production de masse a simplifié ces organismes et en a fait des robots spécialisés, strictement limités à l’essentiel. Mais plus qu’une libération, c’est une amélioration des conditions industrielles qui est devenu l’objectif principal. Sans doute, le genre humain aura-t-il tout à gagner de l’efficacité apportée par des robots qui n’ont ni désir ni revendication. Mais les choses se compliquent : les robots ne sont plus fabriqués et les hommes disparaissent inéluctablement. Les robots finissent par se révolter et exigent d’entrer en possession du secret de la vie, ce qui n’est plus possible. A la fin de ce drame, la jeune et belle Hélène Glory est courtisée par le robot Primus qui est prêt à se sacrifier pour elle. Le savant qui voulait disséquer Hélène les laisse partir car il a compris qu’ils étaient l’Adam et Eve d’une ère nouvelle alors que le monde artificiel créé par la science et la technique va disparaître à jamais. C’est une fable tragique se terminant par une curieuse note d’espoir et une vague transcendance. Mais elle a préservé toute sa force et son caractère prophétique.
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