Dossier Bruno Macé
Des uns aux autres, l’entremise de l’art.

par François Barré

mis en ligne le 14/01/2011
Bruno Macé a choisi d’investir l’espace public, exclusivement. Il est, pour lui, l’espace majeur de notre relation au monde ; un champ séparé et spécifique n’entretenant pas de relations avec d’autres lieux de l’art. Ainsi affirme-t-il , de façon Manifeste qu’une histoire est passée et que l’espace public et l’espace collectif (1) possèdent des propriétés induisant un partage démocratique et une nécessaire présence de l’art.

Dans les musées ou les galeries, l’art, retiré du tohu-bohu de l’espace partagé, s’offre au regard et à la dilection pour entretenir avec le regardeur une relation singulière. Les amateurs viennent là pour retrouver un cheminement, une connivence ou un trouble. L’artiste sait qu’en ces lieux, il peut expérimenter et donner à voir l’ébauche d’un mouvement et la trace, encore, d’une hésitation. La contrepartie de cette proximité entretenue avec le regardeur (et qui souvent a reçu un carton d’invitation), c’est l’éloignement du plus grand nombre.

La démocratisation de la culture affirmée par André Malraux, quand il créa le ministère de la culture, devait passer par l’élargissement des publics attendus dans les musées pour y découvrir « les chefs-d’oeuvre de l’humanité ». Quarante-cinq ans plus tard, les résultats institutionnels de cette démocratisation nous laissent perplexes. En pourcentage et par catégorie socioprofessionnelle, la fréquentation des équipements culturels n’a quasiment pas bougé. (2)

A la maison, dans la familiarité de la vie quotidienne, l’oeuvre d’art entretient avec le collectionneur une relation d’intimité. Riche de tensions et de raisons secrètes, cette relation là est offerte à chacun selon ses aspirations et ses moyens. Mais l’espace est clos et la rareté sa clé.

L’espace public et l’espace collectif sont d’une nature différente. L’espace public, exprime l’advenue et la bienvenue de la démocratie (forcément métisse) et la recherche d’un espace partagé pour une parole commune. Condensé de la ville et de ses diversités, il croise les pouvoirs, les usages, les fonctions et les symboles. L’oeuvre s’y expose à tous les risques : ne pas être vue, être vassalisée, vandalisée, détournée, servir d’aire de jeux, de porte-manteaux, de signalétique ou de panneau d’affichage ...Mais, en retour, cet espace ouvert à tout vent offre la chance de rencontrer les regardeurs du tout venant, du tout vivant, cet introuvable « nonpublic » qui constitue la chair et l’ossature d’une société.

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