Dossier Bruno Macé
L'art dans la ville, pour une autre approche

par Bruno Macé

mis en ligne le 14/01/2011
L’expression «Art public» est souvent assimilée à une extension du musée vers l’espace public.
Ce « glissement », qui repose historiquement sur un malentendu, freine l’émergence de pratiques pertinentes et novatrices dans l’espace public.

L’Art plastique occidental, si on exclut les psautiers, par nature privés, a de tous temps été, d’abord, une expression destinée à l’espace public, parfois réduit à un espace communautaire. Des frises de l’enceinte de Persépolis, aux fresques de Giotto sur la vie de Saint François d’Assise, l’Art est public.
A Pompéi, les oeuvres dont le propos dépasse l’intention décorative sont dans les salles de réception. Les portraits de Philippe IV par Velázquez, le cycle sur Marie de Médicis de Rubens au Palais du Luxembourg, les banderoles et arcs de triomphe peints par Titien à Urbino ; autant d’exemples de cet art qui, pour longtemps encore, reste d’abord un outil de communication au service de…
«Le bon et le mauvais gouvernement», peint par les frères Lorenzetti dans la salle du conseil à Sienne, a pour but de rappeler aux édiles du peuple, à leur proche entourage et aux personnes reçues, le type de gouvernement qui se pratique dans cette ville. « Marat assassiné «, de David, première crucifixion laïque de l’histoire de la peinture où David a retenu la leçon de Rubens donnée dans « La descente de croix d’Anvers», est, avant tout, un outil de propagande pendant les funérailles de l’ami du peuple.

L’apparition d’un art destiné à l’espace privé, espace qui comporte une dimension physique mais aussi mentale, est un phénomène relativement récent. L’autoportrait de Van Eyck et le portrait qu’il fit des époux Arnolfini symbolisent assez bien ce glissement. Un glissement qui ne se fait que très lentement et est la marque, d'une part, du partage du pouvoir avec de nouvelles couches de la population, mais aussi, d'une culture croissante de l'égo en détachement de la sphère collective. Même si le XVIIème siècle voit se multiplier les collections privées, telles celle de Mr de Chantelou autour des oeuvres de Nicolas Poussin, il faut attendre la fin du XVIIIème et le XIXème pour que le versant privatif occupe le devant de la scène, avec un art qui est celui de l’amateur, le « connaisseur » anglais.

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