Le théâtre
Vous voulez rire ?
par Pierre Corcos
mis en ligne le 28/12/2011

       La satire arrache "l'enveloppe brillante dont chacun, paradant sous les regards, recouvrait sa laideur intérieure" , écrivait le poète latin Horace. Les hommes de pouvoir n'apprécient pas cette critique railleuse qui les tourne en ridicule. Mais le public aime à rire des poses de ceux qui, avec emphase et componction, les gouvernent. Parfois la pose d'un président peut consister en l'ostentation d'une fébrile suractivité, dont le bilan global, loin d'être convaincant, laisse plutôt entrevoir que cette "hyperprésidence" ne fut qu'une dérisoire gesticulation... C'est à l'évidence du président Sarkozy que, dans le spectacle haut en couleurs,"René l'énervé", "opéra bouffe et tumultueux" (sic) sur une musique de Reinhardt Wagner, Jean-Michel Ribes se moque. Ce petit homme remuant, qui court sans cesse et n'apprécie que le bon sens, ce René-Nicolas convient à merveille au parti majoritaire, en quête d'un chef providentiel, d'un Rambo... Le coup de génie de l'auteur, Jean-Michel Ribes, c'est d'avoir fait d'un jogging permanent - grotesque on s'en doute à la longue - le marqueur métaphorique de la présidence Sarkozy. Un certain nombre de ministres, ridiculisés par moult pitreries et des tenues bariolées, vont rejoindre leur président surexcité dans ce rigodon étourdissant, ce cancan déchaîné... Jean-Michel Ribes prône le "rire de résistance" et le met ici en acte, entreprise salutaire, même si la réalisation, imposante, riche en moyens, écrase un peu le propos satirique initial, en favorisant le spectaculaire divertissant de l'opéra bouffe. En outre, le texte, versifié, enveloppe plus qu'on ne l'aurait souhaité la charge comique. Mais, à ces quelques réserves près, "René l'énervé" appartient à ce genre de spectacles satiriques et farcesques roboratifs, bienvenus, mais qui se font trop rares sur nos scènes.

       Qu'il puisse y avoir du tragique dans le comique, surtout si l'auteur se moque méchamment de lui-même, voilà ce qui ôte le préjugé selon quoi tout rire ne peut qu'être une facile raillerie à l'encontre des autres. Dans le "one man show" de Guy Carlier, mis en scène par François Rollin, Ici et maintenant, ce qui est, entre autres choses, mis en jeu par l'humoriste (connu surtout à la radio), c'est le drame de son obésité. Devenu énorme, pachydermique, tout de noir vêtu et suant sous l'éclairage, Carlier fait peine à voir tout en faisant rire. Il confie qu'il a pesé jusqu'à 235 kilos !...

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