Dossier Claude Jeanmart
BOUT À BOUT
(une autobiographie par fragments)

par Claude Jeanmart

mis en ligne le 18/04/2012

        Le travail de l’artiste, fait de manipulations, de corrections, d’essais, de choix, n’est en rien sacré, même si la peinture est d’abord de la pensée, transformée en actes, et si à ce titre, elle ne saurait être réduite à sa seule existence matérielle.
Je vous ai d’emblée expliqué ma position, par honnêteté : vous m’avez répondu spontanément que cette position vous intéressait.
        Dans une période où les intégrismes, où les intolérances de tous bords envahissent le quotidien, et par conséquent celui des créateurs, votre ouverture d’esprit, ne pouvait que trouver chez moi un écho favorable.
Fidèle à ma manière d’être, de penser, de peindre, je me suis mis au travail, sur ce thème de la résurrection.        On peut y voir la métaphore du désir de tout être vivant de ne pas avoir vécu pour rien, on peut y lire l’angoisse toute humaine, d’une disparition inéluctable, d’une perte d’identité.
        Pour ma part la résurrection c’est l’émerveillement du jour qui revient après la nuit, du printemps qui refleurit après l’hiver, c’est plus encore, le fait que toute pensée, que toute œuvre d’art, dès l’instant où je la rencontre, où je la regarde, m’est contemporaine. Aristote, comme tant d’autres, aujourd’hui me parle de ma peinture, m’aide à clarifier mes choix plastiques, me pousse vers demain.
        Laisser une trace (de peinture ! ), c’est d’une certaine façon , subsister au delà de la mort physique. Mais nous ne savons pas si nous laisserons des traces durables, ni de quelle nature seront ces traces !
        La technique picturale que je mets en place progressivement, doit beaucoup aux bisons peints sur les parois des grottes ; et je ne ressens aucun écart entre leurs auteurs et moi-même : devant l’audace de leurs tracés, devant l’abstraction des solutions plastiques qu’ils ont retenues, je mesure combien nos pensées sont contemporaines, combien elles se font suite.
        J’ai ainsi le sentiment de m’inscrire, modeste maillon, dans une immense chaîne humaine : mes actes sont mon éventuelle résurrection.
        Ainsi le mot “résurrection”, synonyme pour moi du mot “art”, pourrait signifier un rejet des conventions et des peurs, un refoulement de l’obscurité, une émergence des pulsions et des désirs, un élan vers la clarté. (16 juin 1997 ).


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