Hommage à Fabien Cerredo (Buenos Aires 20 novembre 1957 - Paris 2 mars 2005) par Ileana Cornea Il reste de toi la passion. Elle est vivante. Cest elle qui donne labondance tumultueuse à tes couleurs et lengrais nécessaire à ta matière pleine de sève. Tu imaginais les choses dans des volumes amples. Les corps de tes femmes aux longs cheveux en désordre que détestent les puristes tu les sentais avec le bonheur du riche paysan. Comme celui-ci qui à lautomne empoigne les graines de blé des sacs débordants, heureux de pouvoir nourrir non seulement sa famille mais tout le village, tu jouissais de peindre. Chez toi la nourriture terrestre et la nourriture de lesprit se confondent. Tes mariées extravagantes sont à couper en tranches et à poser sur la table comme des rôtis de dinde. À travers elles nous contemplons tes rêves damour, dart et dArgentine. Ta peinture, cest toi. Alors tu es là parmi nous pour toujours. Par signes interposés. Par ton paysage rouge et noir que lon franchit des yeux pour aller rejoindre la souffrance de Baudelaire parce que à la tienne on ne pensait jamais. Ton ami Panglos et la ronde Cunégonde tu les as ressuscités des mots incisifs de Voltaire. Pour les rendre palpables, tu les as vautrés dans la peinture. Tu aimais peindre tes impressions de voyage. Et tes voyages tu les faisais à travers la littérature. Le monde mythique de Garcia Marquez souvrait devant ton imagination comme un chemin dans la forêt tropicale. « La vie inestimable de Gargantua» était ta philosophie, la consolation de ton esprit. Tu admirais le sublime Velázquez et Zurbaran, le géant. Dans ton oeuvre foisonnante tu nous parles de toutes ces choses-là avec la délicatesse du barbare. Sur la Terre on a proclamé que l oeuvre de Cerredo est baroque. Du baroque, te souviendras- tu au Paradis ? Il neige sur Paris aujourdhui, je pense à toi et au tango. Ileana Cornea © visuelimage.com - reproduction autorisée pour usage strictement privé - |
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