DVD

par Guillaume de Boisdehoux


Ne vous étonnez pas en découvrant ma particule. J’ai tenté, avec bienveillance, de franchir cette immense distance entre MOI et le peuple. Tâche difficile et je me dois de rendre hommage au fondateur de ma famille, William Aldebert of Hollywood, fils de Ken Chilpéric of Beverly Hills et de Barbie Cunégonde of Santa Barbara. Aux croisades, il avait rejoint Saint-Louis à Châtelet, sur la ligne numéro 1 en tête de station, pour aller casser de l’Infidèle. Bill Aldy était également très proche des gens ; il en possédait un millier dans son jardin à Los Angeles. J’ai également décidé de scinder cette chronique en deux parties : fiction et documentaires.

Fiction

Le fils d’Elias,
Daniel Burman, réal.
Argentine 2003, Océan Films DVD
Voici un film sur ce qui peut arriver aux gens privés de leur père. Sans juger quiconque, la femme abandonnée ou ayant abandonné le père de ses enfants, la veuve ou la mère célibataire volontaire, quid des femmes qui, se défendant d’avoir opéré un transfert, ont une relation amoureuse avec un homme 25 à 30 ans plus âgé qu’elle ?
Certes, l’importance du patrimoine et des moyens croît souvent avec l’âge, mais là n’est pas la seule raison - bien que très importante surtout quand il y en a beaucoup, de fric, et qu’aucune précarité ne pointe le nez - à ces unions étranges, pas plus qu’une gérontophilie galopante. Le mensonge permanent et la dissimulation ne peuvent couvrir longtemps ces choix. La recherche pathologique (esclave masochiste) d’un homme beaucoup plus âgé, souvent dominant et même sexuellement dominateur (maître sadique) ne vient-elle pas, le plus souvent, de l’absence du père, au sens géniteur ou même seulement symbolique ? On trouvera chez les mêmes individus la fausse culture, avec " j’achète le Goncourt chaque année ", (Renaud avait raison dans " Mon Beauf " !) ou la recommandation du best seller mondial du moment, les deux ou trois disques de jazz (bien blanc ou si possible très consensuel) qui font un vernis craquant si vite qu’on se demande comment il a pu couvrir le vide si longtemps.
Dans les perversions, le problème vient de leur non-reconnaissance par celui qui en est victime, car on en est victime, et à plaindre, et surtout de la transmission à ses propres descendants, la non-rupture d’une chaîne terrifiante. La " fausse Lolita mais vraiment pute " sera tyrannisée par sa propre fille, qui la hait pour mieux lui ressembler, en la caricaturant. Il faudrait reconnaître, et pouvoir combattre, les MPT, Maladies Psychologiquement Transmissibles.
Le Fils d’Élias montre le vide créé dans la vie de son fils par l’absence du père. Dans ce film très beau, la petite communauté constituée dans une galerie marchande de Buenos Aires est troublante, attachante, on a envie d’y retourner. Un très jeune réalisateur qui, comme j’aime à le dire dans quelques rares cas, a tout compris. Il a compris que le cinéma est un art, il en a compris l’écriture, il sait faire passer beaucoup de choses. À suivre, il possède un grand talent.


Marx Brothers
Coffret 6 DVD Warner Brothers
Il manquait, il est arrivé. Je l’ai immédiatement acheté, bien entendu. Sans commentaire autre que la présence d’intéressants bonus, une présentation originale et sympa, boîte métallique coffret et, bien entendu, le génie des Marx qui sont les pères du comique mondial.


Head-On, (Gegen die Wand)
Fatih Akin réal., MK2 Vidéo
Pourquoi ne pas avoir traduit le titre en Français par " Dans le Mur " !? Je ne sais pas quel accueil a reçu ce film en salles, mais ce titre ne me donnait pas particulièrement envie de le voir. Fidèle à ma lourde tâche de chroniqueur DVD, j’ai finalement mis la galette dans le lecteur pour découvrir un très bon film.


Broken Wings
Nir Bergman, réal. (Israël)
Diaphana Édition Vidéo
Israël, un peu comme Cuba, est un pays qui, si la presse qui y est consacrée chaque jour dans le monde devait rapporter au pays un sou par ligne imprimée, serait immensément riche. Un peu comme pour Cuba encore, les jugements les plus féroces proviennent souvent de gens qui n’y ont jamais mis les pieds mais qui, au nom d’une pseudo appartenance à une mouvance politique bien pensante et politiquement correcte, qui n’empêche aucunement un extrême confort matériel, ne sauraient faire une phrase sans condamner en faisant semblant de plaindre les uns ou les autres opprimés. Il faut avoir sa victime, ça déculpabilise d’avoir tellement de fric, surtout quand on ne l’a pas gagné ! Dans ce film, il n’est pas question de politique, pas une seule fois, pas de la guerre, pas des attentats, mais de la vie. Donc de politique, de la guerre, des attentats, de la peur qui, chaque jour depuis 57 ans, saisit chaque Israélien dès qu’il a vu monter son gamin dans le bus qui le conduit, le matin, à l’école. Peur, insécurité, et amour. Un très beau film, émouvant, bouleversant quelquefois.


Cure
Kiyoshi Kurosawa, réal. (Japon), MK2
Vidéo
Polar japonais du plus haut niveau, avec un serial killer (ça doit se dire " seriaju killeru " en japonais à mon avis, vu qu’il disent " tabulu" pour table et " purantu " pour plante), une image du même niveau, que demander de plus. Ce Kurosawa est à suivre… (je parie qu’il y a au moins un lecteur qui va suivre mon conseil !)


Les Amours d’une Blonde
Au feu les Pompiers
Milos Forman, réal. Tchéc., MK2 Vidéo
Avant de connaître la gloire à Hollywood avec, en particulier, Vol au-dessus d’un de coucous, que je ne me lasse pas de revoir quand je croise un fou, ou une folle, ce qui est fréquent (mes rencontres ou les fous et folles ?), Forman était un cinéaste tchèque. Et à l’époque, avant son départ ou son non-retour au pays en 1968, la Tchécoslovaquie n’était pas vraiment une contrée joyeuse. En 1996, je peux vous dire que ce n’était pas plus marrant. Bon, laissons ce sujet. Forman fait du cinéma dès qu’il travaille. Il a le virus, la vocation. Et ces deux films, presque en noir et noir, témoignent déjà du talent du cinéaste. Deux très bons films.


Gente di Roma
Ettore Scola, réal. Italie, Océan Vidéo
Ah! Rome vue par Scola ! Un régal. À mi-chemin entre le documentaire et la fresque romanesque, tant les personnages sont brillants, ce film est un chef d’œuvre. Voir le personnel de nettoyage au Palais de Justice, inoubliable, ou encore celle qui dit à sa belle sœur, qui dit qu’elle a " cet homme dans le sang " : " oui, et je sais comment il est entré ! ". Rome surprenante (je parle de Rome au féminin, impossible de concevoir UN Rome, sauf au Vatican, mais c’est une autre histoire) de diversité, de tolérance, de mélange, d’unité aussi parce que, d’où qu’on vienne, quand on vit à Rome, on devient Romain et héritier de cette histoire qui est la nôtre, aussi.


Osama
Siddiq Barmak (Afghanistan 2003), MK2
STOP : chef d’œuvre ! Et le premier ou, pire, la première qui me parle du " droit " des femmes musulmanes à porter le voile, je la condamne, avec moi comme seul juré, à un visionnage en boucle de ce film pendant un mois ferme, avec comme seule nourriture du yaourt de là-bas et vêtue d’une burka, bien entendu. En cas de récidive, un stage d’un an ferme avec un petit groupe de GT, les Gentils Talibans. Si un lecteur a une observation à faire sur ce que je viens d’écrire, il est le bienvenu. Je lui recommanderai d’acheter ou louer ce DVD d’abord, avant une discussion. Une petite fille, pour ceux qui ne connaissent pas l’histoire, doit se déguiser en petit garçon pour pouvoir travailler, parce que sa mère n’a plus d’argent, parce que sa mère est médecin dans un hôpital détruit par les Talibans, mais elle est une femme et n’a pas le droit de travailler. La petite non plus, elle doit devenir un petit garçon et elle est enrôlée dans une école de garçons, d’hommes (les vrais, les durs à moustache, barbe et autres attributs virils qui font honte quand on voit ce film). Et c’est ce monde qui veut changer le nôtre !

Documentaires

Auschwitz, L’album la mémoire
Alain Jaubert, Montparnasse Vidéo
Soixante ans, et tout recommence ! Il s’est bien trouvé quelques abrutis, par exemple un ancien humoriste ayant mal viré, pour déplorer les " célébrations " liées au soixantième anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz. Laissons-les a leur bile ! Il faut célébrer cette libération, comme il faut, sans cesse, garder à l’esprit, je ne dis pas en mémoire tant ceci est réducteur, l’immensité de l’ignominie.
Et alors que je croyais avoir tout vu, tout entendu, tout lu sur ce sujet, voici ce " petit film ", le commentaire par six femmes rescapées du camp d’un livre encore mystérieux, un livre de photographies, d’excellente qualité (ils ont toujours fait des bonnes machines ces Allemands !), mais dont on ne connaît pas l’auteur. Outre la force de l’image fixe, dont m’a convaincu mon excellent confrère dans ces colonnes Jean-François Conti, qui ici dépasse et écrase sans discussion les images de Spielberg dans La Liste de Schindler (qui est un bon film pour ceux qui n’auraient rien su du génocide sans l’aide de Hollywood), la force des commentaires, en voix " off ", est étonnante. On retrouve les perfections imparfaites de la photo noir et blanc et de la radio, deux médias qui, c’est rare maintenant, laissent une place à l’imagination du récepteur, spectateur des images ou auditeur des paroles. Peut-être par l’emploi de ces moyens incomplets ce DVD acquiert-il une force et un pouvoir rares. C’est donc un document très important dans ceux qu’il faut avoir vu, lu, entendu sur Auschwitz.


Jean Rouch,
La geste cinématographique
Montparnasse Vidéo
J’avais neuf ans, je crois, lorsque j’ai rencontré Jean Rouch la première fois. Comme c’était également la dernière fois, je précise qu’il était venu animer une séance de cinéma dans une école que je fréquentais. Il nous montrait Moi, Un Noir. Je n’oublierai jamais cette séance de cinéma, la découverte du cinéma-vérité qu’il avait inventé et qui deviendrait la fondation de la Nouvelle Vague. Jean Rouch était un immense cinéaste, du gabarit d’Abel Gance, de ces pères du cinéma qui, de temps en temps, ensemencent l’art. Ce coffret est indispensable à quiconque prétend connaître, voire aimer le cinéma.


Serge Daney
Itinéraire d’un ciné-fils,
Montparnasse Vidéo
Quand Daney " sévissait ", je n’étais pas en France, mais ailleurs. Alors j’ai manqué ses critiques, son regard sur le cinéma, son action et ses positions. Grâce à ce DVD, j’ai comblé ce trou, merci ! Un grand penseur du cinéma, avec des mots simples, ce qui est bien agréable.


Raymond Aron, Spectateur engagé
Montparnasse Vidéo
On s’est longtemps demandé s’il fallait avoir raison avec lui ou tort avec l’autre normalien, Jean-Paul Sartre. Je regarde le DVD et je vous dis ce que j’en pense, après un bref message publicitaire. Merci d’être restés à l’écoute. Bon, il faut que j’avoue quelque chose : je me suis endormi, à deux reprises, en visionnant ce documentaire. L’heure tardive, ma fatigue intense (imaginez ce que représente la rédaction de cette chronique tous les trimestres, vous aurez une idée de la vie épuisante que je mène dans l’inconfort d’un minable appartement de fonction de 600 mètres carrés, en duplex, offert par la revue à chacun de ses rédacteurs) sont très certainement plus responsable de mon assoupissement que le pauvre Aron. Mais, mais … qu’est-ce qui fait que, alors que tout ce qu’il dit est l’expression d’une des plus grandes intelligences qu’il m’ait été donné de regarder fonctionner, il est … chiant ! J’en ai fait la remarque à un de mes grands amis (il y en a si peu qu’il se reconnaîtra !). Pour lui, qui connût Aron personnellement, qui en fut le convive et l’élève, j’ai tort : Aron est, était, passionnant. Pour un autre de mes grands amis qui, lui aussi, se reconnaîtra, j’ai absolument raison : Aron n’a jamais eu ce charisme qu’a eu, même en disant les pires conneries, Sartre. Alors, que faut-il en conclure ? : il faut voir ce DVD, si possible en le commençant avant 2 heures du matin et pas à la fin d’un trimestre épuisant. Alors, comme j’ai pu le faire une fois reposé, on appréciera le spectacle de cette intelligence étonnante et l’on gardera le souvenir d’un regard qui, par la souffrance induite de l’intelligence et de la vie, reste gravé en vous. Un beau regard, un regard juste.


Fahrenheit 9/11
Michael Moore
Je l’ai acheté alors je ne dis pas qui !
Bowling for Columbine m’avait beaucoup touché, voir le dernier Verso. Fahrenheit avait reçu la Palme d’Or à Cannes, ce qui, après l’avoir visionné en DVD (je ne vais plus au cinéma, pas le temps) me paraît à la fois justifié et courageux. Certes, ce n’est pas un de ces films classiques comme on aime, mais qui en fait aujourd’hui ? Alors il fallait saluer ce film de Moore. Il est moins fort que Columbine, parce qu’on sait plus ou moins déjà tout : Bush est un gangster, stupide, fasciste, lui et son équipe sont corrompus jusqu’à la moelle, sa voiture présidentielle a été bombardée d’œufs sur le chemin de la Maison-Blanche, il avait, finalement, tout intérêt, pour exister politiquement, à ce que Ben Laden, armé par les Américains, détruisent le World Trade Center. C’est pathétique, effrayant aussi, mais c’est la démocratie, et comme dit le directeur du journal qui était le " journal de référence de l’après-midi ", la plus grande démocratie au monde, ce qui me laisse pantois quand on sait que moins de 50 % des Américains votent. Mais ils ont voté pour Bush, tant pis pour eux.


La Guerre du Vietnam
Images inconnues
Montparnasse Vidéo
On croyait avoir tout vu ! Mon ami Conti m’avait même fait l’honneur de m’inviter à regarder ses innombrables livres de photos dont ceux, terribles, de la Guerre du Vietnam, dont il disait que la photographie, des photographes tels que Larry Burrows, l’avaient fait perdre au Etats-Unis. Avant ce film, on n’a rien vu. Documents déclassés des archives US, très dur, impitoyable. Qu’allaient-ils foutre là-bas ? Que font-ils en Irak ? Bref …


Classic de Poche RKO
Montparnasse Vidéo.
On ne critique pas les classiques, on les revoit, on les voit quand on ne les a pas vus. 4 vagues, avec 10 nouveaux titres, parmi lesquels : Sylvia Scarlett, Swing Time, Shall We danse, Berlin Express, The Fugitive, The Informer, The Set-up, Blood on the Moon, Wagon Master, Thirteen Women. Les réalisateurs sont, dans le désordre, bien entendu : Cukor, Ford, Wise, Tourneur, Stevens… Maintenant 45 titres dans cette collection, on pourrait quelquefois se passer de l’introduction un peu… de Serge Bromberg, mais il y a la touche " next " sur la télécommande du DVD !

Guillaume de Boisdehoux
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