DVD par Guillaume Boisdehoux Plume de Cheval, (Horse Feathers, Norman McCleaod, 1932) Lexplorateur en folie, (Cocoanuts, Victor Heerman, 1930) Soupe au Canard, (Ducksoup, Victor Heerman, 1933) The Marx Brothers Jaurais souhaité parler longuement de ces films, tant les Marx Brothers ont fait, depuis
très longtemps, partie de mon univers mental, à mon plus grand bonheur. Mais la société distribuant ces chefs duvre en France nest pas digne de cet honneur. Vous savez, cest la société qui vendait de leau à des municipalités dont les dirigeants acceptaient très volontiers les « récipients plein du fruit de la vigne » quelle distribuait généreusement, payés par le consommateur tant quà faire, et qui, par les malversations dun mégalomane de petite taille, ça va souvent ensemble, a gonflé comme la baudruche quétait son président, pour se dégonfler lamentablement. Au passage, ce mégalo et ses petits affidés qui se voyaient déjà « head of studio », faisaient perdre leurs retraites à leurs employés et leurs économies à leurs petits actionnaires. Mais les grands actionnaires nont rien perdu, comme lautoproclamé « philosophe » qui a récemment inventé le « reportage romancé » pour faire encore plus de fric sur le dos de ceux qui, eux, ont eu le courage daller voir lhorreur pendant quil montrait son décolleté à la télévision. Cette starlette, qui ne laissera aucune trace, quil le sache, a mis en branle ses avocats pour récupérer les TROIS MILLIONS dEUROS (une part de ses biens !) investis par sa holding (sûrement une holding philosophique) dans les actions de ladite société. Il méritait vraiment les tartes à la crème que mon très cher ami le Gloupier lui a lancées. Jai beaucoup regretté de ne pas en avoir une douzaine, de ces tartes à la crème, sous la main lorsque je lai vu, parce quil mettait beaucoup de temps à sortir de sa grosse Jaguar, refaisant sa mise en plis et armé de lunettes noires alors quil faisait très sombre, dans une rue de Paris. Alors cette société offrait « 2 DVD pour le prix de 3 » et comme VERSO ARTS ET LETTRES, en proie aux difficultés de la presse intelligente, devait réduire mes émoluments monstrueux, javais acheté les trois DVD, je fis comme on me lindiquait et reçu, il y a quelques heures, le courrier suivant, que je ne cite pas mais
Jadresse copie de cet article à la société en question, sans plus de commentaire. Le Figaro (et Le Monde) et le week-end. Beaumarchais, linsolent Lucchini, Yanne
La Bûche, Danièle Thompson, Claude Rich, Emmanuelle Béart, Nelly et M. Arnaud, Claude Sautet, Emmanuelle Béart, Michel Serrault La Crise, Coline Serreau, Vincent Lindon, Patrick Timsit, Masques, Claude Chabrol, Philippe Noiret Eva, Joseph Losey, Jeanne Moreau Le Figaro Magazine Ne le dites pas à ma mère, jai acheté, ces quatre derniers week-ends, le Figaro « complet », avec le quotidien, qui ne brûle même pas bien, le « magazine », alors que je hais ce quil véhicule, le « télé », moi qui nai même pas de récepteur, et le « madame », moi qui déteste la presse « féminine » sauf à lépoque des maillots de bains et des publicités pour la lingerie fine, comme Woody Allen. Et oui, mon père, ou ma mère, jai pêché, mais jai une excuse, deux même : je voulais em
Le Monde qui moblige à acheter son numéro du WE avec lindigeste Le Monde 2, dont le mauvais goût est immense, la mise en page illisible, lintérêt nul (à moins que les aventures touche-pipi dune star déclinante au sexe et à la couleur indéterminés vous passionnent !), une sélection darticles du New York Times alors que, si je veux, je peux lacheter et le lire mais je ne le veux pas, aucun intérêt non plus, et même des petites annonces, dont je signale quelles sont périmées, ayant paru une semaine avant, pour acheter des téléviseurs ou canapés doccasion, alors que ! Bref, je refuse le diktat du Monde et ne lachète pas le WE et, pour enfoncer le clou, jachète le Figaro parce que, en plus jai un bon film pour 7 euros. La différence des ventes est doublée (moins un et plus un), ça va durer le temps de loffre du Figaro, une dizaine de semaines et, espérons-le, Le Monde abandonnera ! Bon, pas dart et dessai dans ces films, mais les six premiers de la série sont bons, alors pourquoi sen priver ? Ceci montre en outre quun DVD peut être vendu moins cher que les 15 ou 30 euros quil coûte, à méditer. Pourquoi ces « boîtiers » chers, alors quune simple pochette de carton, avec juste assez dépaisseur de dos pour lire le titre, suffirait amplement ? Pourquoi surcharger de livrets quand, seul, le film présente un intérêt ? Le DVD Documentaire. Lexistence même de cette chronique dans VERSO montre quun support, un « média», peut, sinon être luvre dart, au moins en être le vecteur essentiel. Jai écrit à plusieurs reprises que bon nombre de chefs duvre auraient disparu sans le DVD, et je maintiens. Le documentaire, autrefois omniprésent en première partie des « séances de cinéma », a disparu des salles obscures parce que « la pub., ça rapporte plus ». Il ne reste que la télévision pour, entre deux blocs dabrutissement, et souvent à des heures impossibles pour le « salarié de moins de cinquante ans », présenter des documentaires destinés à éclairer. Nul doute que le DVD, si son prix est abordable, permettra de sinstruire dune manière unique. Les titres offerts ici par Montparnasse Vidéo sont de parfaits exemples dune réussite totale. De Nüremberg à Nüremberg Frédéric Rossif, Éditions Montparnasse Un coffret de 3 DVD dont le premier dure pas moins de 3 heures, une fresque qui couvre douze ans, de 1933 à 1945, co-écrite par Philippe Meyer qui est plus éloquent ici que dans son café du commerce pour snobs de France-Culture du week-end ! Il faut revoir ces images pour ne jamais oublier comment, en quelques années, un faisceau de facteurs dont la misère, le chômage, la démagogie, labsence de véritable justice, le mépris des faibles et laccroissement des privilèges des riches et puissants, laccroissement des inégalités et lapparition dun « sauveur » sachant réveiller les bons vieux démons, comment ce cocktail peut faire basculer le monde dans une horreur inédite. Quand largent devient tout puissant, quand on laisse mourir les vieux parce que cest encombrant et ça coûte cher et il y a lhéritage , quand on condamne un gosse à 18 mois ferme pour une barrette de haschich et que le ministre de lintérieur lui dit : « cest que tu las mérité » et quen même temps on commente des décisions de justice pour tenter de faire dun condamné un saint, quand une phrase désagréable à lencontre du même ministre vaut à son auteur un mois de prison ferme, quand on jette les gens dans la rue parce que cest moins cher de faire produire ailleurs, quand on méprise les petits, quand on fait de la démagogie à tout crin, du communautarisme dont le seul résultat est de dresser les uns contre les autres les citoyens, un jour, apparaît un clown triste, qui sera petit de taille et grand de cynisme et
Il apparaîtra comme un sauveur, celui qui a fait reculer, en trafiquant les chiffres, la criminalité, qui sait tout faire en même temps. Son absence totale de scrupules plaira, parce quil est plus payant en politique dêtre un salaud cynique quun type propre, il suffit de se reporter au 21 avril et au 5 mai 2002. Ne dramatisons pas, mais rien nest jamais acquis. Et le film de Rossif le rappelle fort opportunément. On en sort abasourdi, même si le sujet figure parmi ceux qui, depuis si longtemps, mobsèdent, parce que je cherche à comprendre mais y a-t-il quelque chose à comprendre à la barbarie ? Les deux autres DVD du coffret sont des entretiens, pour le second, avec Marc Ferro, Edouard Husson et Annette Wieviorka, le troisième étant un documentaire passionnant de Francis Girod. Cinq heures en tout. Et si on en ressort cassé, on est aussi plein de reconnaissance et despoir, parce que la mémoire nest pas perdue. Histoires dAmérique Norman Mailer, Une série de J.-P. Catherine et Michael Seiler Réalisation Richard Copans et Stan Neumann, Montparnasse Vidéo Pour ceux qui ont encore du mal à distinguer Norman Mailer de Henry Miller ou Arthur Miller, voici quelques repères qui vous éviterons le ridicule entre le fromage et le dessert de votre prochain dîner mondain. Essayez dailleurs dy parler des livres dAzuleiros, vous verrez, ça marche. Arthur Miller est dramaturge, fut un des maris de Marilyn Monroe. Henry Miller, qui est mort, est lauteur des Tropiques (Cancer et Capricorne) et de lunique « Trilogie en Rose : Sexus, Plexus, Nexus », parmi une cinquantaine de chefs duvre. Norman Mailer est à la fois romancier, essayiste, journaliste, cinéaste, acteur, activiste politique, personnalité des médias et, ce documentaire le prouve, probablement le meilleur connaisseur de lAmérique (Etats-Unis dAmérique du Nord). « Je me sens malheureux à cause de mon pays. Il nest pas devenu aussi grand, aussi noble que je le souhaitais. » « Jaime ce pays. Je le hais ». Voici deux phrases de ce Prométhée, ce prophète, cette conscience quest N Mailer. Il a fêté ses 83 ans le jour où jécris ces lignes, et jaurais aimé lui envoyer un message de bon anniversaire et de remerciements pour ce quil a fait de sa vie, de sa tête : une uvre, un acte de militantisme. Sa détestation de lhypocrisie des Etats-Unis est magnifique parce quil lexplique, parce quil la comprend. Le bonhomme est fascinant, il faut le voir et lentendre répondre, il y a quarante ans, aux féministes « hard » des Etats-Unis, se faire arrêter volontairement par larmée au Pentagone quand il est en tête des défilés contre la guerre du Viet-Nam, ou encore reconnaître quil na pas été à la hauteur en ne simpliquant pas, concrètement, dans la lutte contre lapartheid qui régnait dans le Sud. À ce sujet, un chiffre cité par Martin Luther King est éloquent : la mort dun Vietnamien du Nord coûtait 350.000 dollars aux USA qui, en même temps, ne consacraient que 53 dollars à chaque personne vivant en dessous du seuil de pauvreté ! Pour quiconque veut tenter de comprendre les USA et ce que ce pays cherche à faire dans le monde, a toujours cherché à faire depuis labandon de son isolationnisme, dominer ce monde, comment ses dirigeants qui sont, en réalité, ceux des grandes entreprises, cherchent à abrutir encore leur population, ce DVD est indispensable. Et cest un Américain, qui vit encore aux Etats-Unis, qui dit tout cela. Ce sont dailleurs les Américains qui, quand leurs synapses ne sont pas encore totalement immobilisés par lobésité mentale, tels que Mailer, Henry Miller dans son « Cauchemar climatisé », Arthur Miller dans son « Mort dun Commis Voyageur », par exemple, ou Ellroy et dautres, savent dire la vérité sur leur pays. Algérie(s) Thierry Leclère, Malek Bensmal et Patrick Barrat Éditions Montparnasse Ce pays pose des questions innombrables, dont celle de sa pauvreté alors quil est doté des plus extraordinaires richesses naturelles, mais LA question que se posent les Algériens, ceux qui vivent en Algérie bien entendu, est : « Pourquoi notre pays est comme ça ? ». Faut-il, plus de quarante ans après lindépendance, continuer à accabler les colonisateurs alors que les pays dAsie du Sud, dans le même délai, sont devenus des puissances économiques et, pour certains, dans le respect dun minimum de droits de lhomme, alors que lAlgérie est endettée et que les violations des même droits sont plus que quotidiennes ? Depuis 1992, plus de 100.000 personnes ont été assassinées par les Islamistes. Mais le pouvoir en place et son armée sont corrompus au point que les généraux portent des surnoms tels que « Général pétrole », ou « Général Gaz Naturel ». Quel est lavenir de ce pays dont il semble que les seuls qui seraient capables de le sauver semble avoir choisi de vivre ailleurs, à labri dans des démocraties occidentales qui, elles, respectent un peu plus, les Droits de lHomme (et de la Femme !). Cest une des questions posées par ce film assez bouleversant. Reprise, Hervé Le Roux, Montparnasse Vidéo « La classe ouvrière » ! Quel lecteur, âgé de plus de quarante cinq ans, na pas entendu cette expression qui, en disparaissant, à fait fondre le Parti Communiste Français, entre autres victimes de cette réalité : il ny a plus de « classe ouvrière ». Il y a encore des ouvriers, de moins en moins en France et le mouvement nest pas prêt de sinverser, et de moins en moins douvriers français, ce qui ne rend pas les autres plus tranquilles quant à des revendications éventuelles, et cest comme ça. Avec la classe ouvrière a aussi disparu la culture du même nom, faite de rites, de chansons, de rassemblements, une culture qui a donné certains des plus grands poètes, romanciers, artistes à notre pays. Qui a tué la classe ouvrière et quand ? Cest ce que ce film raconte, à la manière dun polar social, de façon magnifique et émouvante. Juin 1968, la droite dure revient en force, le père de lactuel Président de lAssemblée Nationale est, aux côtés de Malraux (qui aurait mieux fait de veiller à sa collection duvres dart ce jour-là), massacre la Marseillaise en nen chantant PAS UNE SEULE NOTE juste, ils sont devant un million de gens qui, souvent de bonne foi, ont cru les Cassandre et ont eu peur du péril rouge en France, ont finalement accepté daugmenter le SMIG qui était, déjà, invivable. Leurs fils gouvernent aujourdhui, mais il ny a plus de classe ouvrière alors que cest pire. Labécédaire de Gilles Deleuze avec Claire Parnet, Éditions Montparnasse Disparu, par sa propre volonté, en novembre 1995, Deleuze était une sorte de star de la philosophie française et ce, non par sa volonté de briller comme lénergumène au décolleté aussi vertigineux que le vide de sa non-pensée mentionné plus haut, mais au contraire par son refus de participation au cirque médiatique qui est le bac à sable de lautre. Deleuze a étudié puis enseigné la philosophie, au sens le plus noble et beau de la discipline, qui nest pas de donner son avis sur tous les sujets qui vendent, de faire office de fournisseur de « prêt-à penser » comme le sont les « nouveaux » et pseudos philosophes qui encombrent les ondes dites culturelles, les colonnes dites éditoriales de magazines à publicité et les listes de signataires de toutes les causes « bien-pensantes ». Pour toutes ces raisons, Deleuze est resté, pour ceux qui nétudient pas la philosophie, un inconnu. Pour les autres, les privilégiés qui ont assisté à ses cours, il était un grand. Combien de fois na-t-on pu regretter de ne pas avoir la chance, le privilège, dassister aux cours dun maître ? Souvent en ce qui me concerne. Grâce à ces HUIT heures de film, jimagine que je rattraperai un peu le temps perdu, loccasion manquée. En tous points remarquable. Le Décalogue Kieslowski, Montparnasse Vidéo Nayant pas encore eu le temps de tous les regarder, il y a 10 films, je me réserve le droit dun article de fond pour le prochain numéro de notre revue. Le coffret est très beau, il est composé de quatre DVD. Je continue. Guillaume Boisdehoux © visuelimage.com - reproduction autorisée pour usage strictement privé - |
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