De la gestation au geste
par Lorenzo Vinciguerra
« L’artiste refait le chemin de l’humanité » me confiait un jour Arnal. Le peintre, lui, refait celui de la peinture, dont l’origine se confond avec celle de l’homme. À son contact, un philosophe comme Merleau-Ponty se trouvait convié au-devant de la même énigme. Comment le visible émerge-t-il du sensible ? Le problème de la perception n’est jamais que le problème de l’origine et de la nature du sens, énigme qu’un linguiste comme Greimas reconnaissait ne pas savoir résoudre, aux prises avec le paradoxe d’une science qui ne peut pa faire plus que constater que le sens est toujours déjà là sans parvenir à le définir. Serait-ce parce que la difficulté à le définir est de même nature de celle qui nous prend quand il s’agit de définir le temps ? Augustin disait que si personne ne lui posait pas la question, il savait ce qu’était le temps, mais si on lui la posait, à vouloir l’expliquer, il ne le savait plus[16]. Peut-être. Mais, la peinture, qui se sait se taire, est moins affaire de temps que d’espace. Le peintre ne voit le jour que quand à la surface du monde il accède à son sens éternellement symbolique. N’était-ce pas cela que Merleau-Ponty appelait son privilège ?
[16] Saint Augustin, Confessions, XI, 14, 17.
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