Pulp fiction
par Max Guedj
Mais ce qui me bouffe, c’est que toi pareillement là bas où tu es tu découvres chaque matin tes seins en lambeaux mélangés à ma sale peau noire et rouge, à mes poils, oui ce qui me bouffe, c’est que toi, sans un mot, tu vives ces arrachements renouvelés chaque jour que tu te regardes pour encore me voir, moi qui suis parti, dans nos morceaux mélangés (et même des choses du dedans du ventre et des aiguillettes arrachées du dos) sans un mot que je puisse entendre à l’autre bout du train notre vie qui ne reviendra plus, remisé bientôt dans sa gare, le mien plus vite que le tien. Collage dit décollage (regarde les avions, comme c’est net quand leur petite roulette arrière quitte le sol), mais soudage dit arrachement. Le suppposais-tu, et imagines-tu une quelconque guérison à cet affreux massacre, ou qu’une quelconque patine répare déchirure, scarification, écorchage. Oh te savoir abîmée, ma beauté, écorchée, skinned alive, même si je ne sais pas pour toi moi, puisque on ne se parle plus nos bouches toutes arrachées l’une dans l’autre... Et même si ça eu atteint - avec le sang giclé/coulé et par-dessus les gifles bleues ou noires de tes culottes - les plus hauts sommets du colorisme. Au mieux comme ces rescapés de la variole, un jour, mais dans trente ans, dans trente ans, et l’autre greffé en toi sous ta peau rapiécée existera-t-il alors, et toi seras-tu poudreuse comme moi bien qu’encore vive. Á la fin, mais c’est sans fin, un arrachement, et rapport à l’amour : l’un écrit toujours pour les deux, et les trois quelques fois, sans jamais savoir, tout en ayant les couleurs pour le vivre, qu’ils ont les yeux encore pour le lire.
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