Le bel autrefois |
Héros et dieux de l’Antiquité,
“Tout l’art”, Flammarion
Chronologie de l’art français au XIXe siècle “Tout
l’art”, Flammarion
L’Art japonais,
Christine Shimizu,
“Tout l’art”, Flammarion |
La réédition de Héros
et dieux de l’Antiquité mérite
d’être signalée car il
s’agit là d’un précieux
guide pour interpréter la peinture
et la sculpture d’autrefois. C’est
un vade-mecum indispensable pour évoluer
dans l’iconographie qui a évolué au
fil des siècles et qui reflète
aussi toute la complexité des récits
mythologiques grecs et latins. En somme un
outil de travail dont aucun amateur d’art
ne pourrait se passer.
Autre réédition importante : celle de la chronologie
très bien établie de l’art français
au XIXe siècle publiée dans la même collection
- instrument très utile (indispensable) pour éviter
les bévues et les plus absurdes recoupements.
Toujours dans la même collection, l’étude
sur les arts du Japon de Christine Shimizu constitue une somme
passionnante de l’art ancien de ce pays. Dommage que
l’ukiyo-e n’y soit pas analysé. |
L’art moghol, George Michell, Gallimard |
L’ouvrage de George Michell est une
merveille. Il nous fait découvrir
toute la beauté des arts « décoratifs » de
l’Inde à l’époque
de l’empire moghol depuis sa fondation
par Babur qui a conquis l’Hindoustan
après avoir vaincu le roi de Delhi à la
bataille de Passipat en 1526. Sous son
court règne, les arts ont pu fleurir
d’une manière extraordinaire.
Ce qui caractérise cet art, c’est
de donner une place majeure aux motifs
végétaux et plus particulièrement
floraux. La richesse luxuriante de ces
thèmes devient la marque distinctive
de ces créations qui abolissent
complètement la ligne de partage
entre grand art et art mineur : l’art
se déploie au sein de l’architecture,
l’épouse et la sublime. On
regrettera sans doute que l’étude
ne soit pas mise en relation avec la production
calligraphique et l’enluminure. Toutefois,
on ne boudera pas son plaisir car ce livre
est une mine et aussi la sublimation d’un
art sans égal.
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Carriès, Amélie Simier,
« Hors série
/Découvertes », Gallimard. |
Je dois reconnaître que je ne sais
rien de Jean Joseph Marie Carriès
(1855-1894), un sculpteur qui n’a
jamais donné dans le gigantisme.
S’il a réalisé de nombreux
portraits de ses contemporains, mais aussi
de figures historiques, il s’est
distingué par d’étranges
compositions, des masques d’animaux
et de personnages fantastiques. Ce qui
caractérise son art, c’est
le choix des matériaux, surtout
le grès émaillé et
le plâtre patiné en plus du
bronze. A la fin de sa vie, il exécute
une porte monumentale en grès émaillé qui épouvante
son commanditaire ! L’excellente étude
d’Amélie Simier permet de
faire cette belle découverte.
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Histoire de l’érotisme,
Pierre-Marc de Biasi, “Découvertes”,
Gallimard |
Imaginer une histoire de l’érotisme
en Occident n’est pas une affaire
très simple en dépit des
apparences. D’une part, les transformations
de nos sociétés n’ont
pas cessé depuis les temps les plus
reculés. De l’autre, ses représentations
ont elles aussi évolué selon
ces métamorphoses de l’art
et du goût. Ce livre est une belle
somme pensée de manière originale
où l’auteur s’efforce
de montrer le caractère libertaire
de l’érotisme et sa fonction
civilisatrice. L’ouvrage s’achève
avec un petit dictionnaire libertin qui
mériterait de donner lieu à un
livre autonome par la suite.
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La modernité, envers et contre
tous |
Chagall et la céramique,
Gallimard |
La Piscine, ce beau musée dont Roubaix
s’est doté, a présenté l’automne
dernier trois belles expositions sur le
thème de la céramique. La
première concerne les tentatives
effectuées par Marc Chagall qui
s’est consacré à la
céramique à peu près à la
même époque que Picasso. Ce
qui a différencié leurs deux
attitudes c’est que ce dernier a
produit des oeuvres avec une grande simplicité de
moyen et d’expression alors que le
premier a tenté un grand nombre
d’expériences, en imaginant
des formes compliquées (comme des
pots anthropomorphes) sans rien jamais
achever : il n’y aura que des pièces
uniques. Chagall n’a ni le sens de
l’opportunisme de Picasso ni sa rapidité de
jugement – il hésite et se
laisse prendre au piège des difficultés
techniques et abandonne. Il n’empêche
que ses céramiques demeurent une
belle extension de son univers dans la
sphère des arts appliqués.
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Guidette Carbonnel, céramiques
et tapisseries, Frédéric
Bodet & Karine Lacquemant, Norma éditions |
Le nom de Guidette Carbonnel ne me disait
strictement rien jusqu’au jour où j’ai
pu le découvrir en visitant les
salles de la Piscine. Cette élève
d’Eugène Carrière,
s’intéresse bientôt à l’expression
la plus moderne en suivant les cours d’Othon
Friesz, de Bissière et de Lhote.
Mais elle est profondément marquée
par le travail sur la céramique
de Josep L. Artigas qui la décide à choisir
ce mode d’expression par la terre
et le feu plus que la peinture. À la
fin des années 30, son oeuvre se
peuple d’animaux fantastiques, souvent
entre la fable et la chinoiserie, d’une
originalité indéniable, pleine
d’humour, mais aussi d’une
haute valeur décorative. Elle se
révèle capable de métamorphoser
et donc de dépasser l’esprit
décoratif de son temps. Après
la guerre, elle continue à privilégier
le monde animal en accentuant encore plus
la dimension facétieuse de son dessin,
cette fois tributaire du curieux graphisme
linéaire et anguleux de cette époque.
Son travail a de caractéristique
de tirer profit d’une mode dominante
et de la plier à ses propres désirs
et fantaisies. Pendant la décennie
suivante, elle invente des personnages
vaguement picassiens avec des têtes
d’oiseaux circulaires (ce sont en
réalité de grands plats),
d’abord des sculptures, et puis des
tapisseries.
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Une collection italienne, Musée
de Lodève |
Après la présentation de
la collection Oscar Ghez, le musée
de Lodève montre celle de Paolo
Dal Bosco. Cet ancien galeriste de Trente
est devenu un grand collectionneur. Il
a commencé par sauver de l’oubli
l’oeuvre de Fortunato Depero. Puis
il a rencontré Warhol pour lequel
il s’est aussitôt passionné (l’exposition
comprend nombre de ses chats et Le Cri
d’après Munch). L’arc
de sa curiosité s’étend
jusqu’à Appell, Gorky, Léger
et Delvaux.
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Vladimir Skoda,
riflessi celesti e meccaniche galileiane,
Mazzotta
Vladimir Skoda,
Specchio del tempo, Mazzotta |
Deux catalogues publiés par Mazzotta
en Italie conservent la mémoire
des expositions que Vladimir Skoda a faites
en Italie ces dernières années.
La première a eu lieu à la
fin de 2004 à l’abbaye de
San Zeno, l’église de Santa
Maria della Spina et dans le foyer du théâtre
de Pise. La seconde s’est déroulée
au cours de l’été 2007
en différents endroits de Spoleto.
Le principal intérêt de ces
publications présentées par
Miroslava Hajek est de confronter les oeuvres
de l’artiste d’origine tchèque à des
situations urbaines et à des monuments
historiques.
Ce rapport n’est pas indifférent quand on songe
qu’il s’inscrit dans une réflexion sur
le cosmos et sur l’espace architectonique. On peut y
lire des considérations tout à fait pertinentes
sur la pensée de Galilée et sur la théorie
des sphères dans la philosophie occidentale. Et l’on
peut aussi y découvrir de nombreuses photographies
de ses sculptures in situ. Ce sont de précieux documents
pour approfondir nos connaissances sur cet artiste très
original qui fait reposer sa démarche sur un double
sens.
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Journal modeste,
Hervé di Rosa, entretiens avec Patrick
Amine,
“Les Cahiers dessinés”, Buchet/Chastel. |
Les conversations d’Hervé di
Rosa et de Patrick Amine permettent de
mieux comprendre la personnalité et
le sens de la démarche de cet artiste
qui a choisi la voie de l’« art
le plus modeste » et qui a même
contribué à fonder un musée
sur ce thème à Sète.
Ce mélange de culture enfantine
et populaire et de remise en cause des
principes du grand art par l’humour
et la dérision n’a pas produit
un art d’une haute portée.
Disons que c’est plutôt un
fait de civilisation, un signe de la crise
que les arts plastiques ont connue depuis
plusieurs décennies. Cela étant
dit, l’univers de di Rosa ne manque
ni d’esprit ni d’invention
et, si on est capable de le prendre pour
ce qu’il est, d’une certaine
poésie faubourienne.
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Frédéric Brandon,
Jean-Luc Chalumeau,
Villa Tamaris |
Pourrait-on considérer Frédéric
Brandon comme le Boudin de notre temps
? Certainement pas. Mais la série
des vaches qu’il a exécutée
en 2002 sous le titre de Qu’est-ce
que la peinture ? permet de s’interroger
sur le sens de sa recherche. Si l’on
y regarde de plus près, ses caches
sont bien irrévérencieuses
: elles piétinent le cadre ou disparaissent
dans le paysage. Le cadre luimême
devient souvent un contrepoint à la
composition. Les harmonies chromatiques
sont à leur tour problématiques.
En somme, plus on les regarde, plus on
se demande le sens de leur représentation
et, simultanément, quelle est la
représentation du sens. Les autres
cycles présentés à la
Villa Tamaris soulèvent des question
analogues (en particulier les autoportraits
en clown). Brandon se révèle
un peintre bien plus complexe et plus surprenant
qu’on le croirait à première
vue.
|
Philippe Berry,
Marcelin Pleynet,
“Les irréguliers”,
Editions de la Différence |
On a le droit de s’interroger sur
la qualité et la valeur de l’oeuvre
sculpturale de Philippe Berry et encore
plus sur celle de la présentation
de Marcelin Pleynet qui valide ce genre
d’entreprise. Ces collages volumétrique
aussi kitsch que malhabiles, sans inspiration,
sans même un grand savoir faire,
constituent une collection de mauvais jeux
de mots plastiques. Le poète accumule
les superlatifs pour définir ce
travail, mais ne trouve pas les phrases
pour nous convaincre de la réelle
portée de ces créations dont
le langage hésite entre la naïveté et
le mauvais goût recherché de
l’art le plus contemporain.
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Contes et récits, Nathaniel Hawthorne,
tr. Muriel Zagha, présentation de
P.-Y. Pétillon; Babel |
Si l’on veut comprendre l’Amérique
d’aujourd’hui, avec ses fantasmes
religieux qui se métamorphosent
en engagements géopolitiques dans
la perspective d’une lutte contre
l’« axe du mal », il
faut revenir à ses origines. Nathaniel
Hawthorne nous fournit une clef essentielle
pour en percer le mystère. Les Etats-Unis
ont été façonnés
par ces protestants chassés de l’Europe,
qui recherchaient une Terre promise, par
tous ces Quakers, Puritains et autres assemblées
sectaires qui se raccrochent à la
Bible comme à un ultime écueil
et qui n’hésitent pas à se
combattre les uns les autres ou à instruire
des procès en sorcellerie. L’écrivain
a dépeint avec un luxe inouï de
détails et avec une précision
impressionnante les comportements et les
mentalités de ces hommes et de ces
femmes dont les dogmes et les valeurs ont été des
armes épouvantables. La liberté qui
s’est inscrite dans la Constitution
ne s’est pas traduite dans les faits
dès qu’il s’est agi
de croyance. Hawthorne a été un
observateur subtil de ce monde qui repose
sur une contradiction qui est encore loin
d’être dissipée et demeure
le fondement du Nouveau Monde.
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Asphodèle, suivi de Tableaux d’après
Bruegel, traduit et présenté par
Alain Pailler, Points |
William Carlos Williams est la pierre angulaire
de la poésie moderne américane.
Il a profondément influencé Allen
Ginsberg et tant d’autres. Pourquoi
? Sans doute parce qu’il a voulu
(et a su) faire s’épouser
la grande tradition poétique et
l’expérience du quotidien.
Dans Asphodèle, il souligne : « Le
poème/est complexe ainsi que la
place accordée/dans nos vies/un
poème…» En réalité,
la plus grande partie de ce long texte
est consacrée à cette relation
intriquée et ambiguë. Dans
les Tableaux d’après Bruegel,
il confronte Homère à des
scènes du temps présent et
ne cesse de remettre en jeu le temps homérique
et le temps modernes. C’est aussi écrit
de manière tranchante et subtile, émouvante
et pleine d’émotions. C’est
d’autant plus surprenant qu’il écrit
ces vers magnifiques pendant les dernières
années de sa vie.
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