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DVD :
Du péplum à l’intime, ou vice-versa ?
DVD : Du péplum à l’intime, ou vice-versa ? par Guillaume Boisdehoux

Le Pianiste,
Roman Polanski, Wild Side Vidéo, Paris Première

Quel enchaînement, n’est-ce pas ! De Roman Polanski, on a tout dit, et bien souvent, hélas, n’importe quoi, tant il est facile de ne retenir d’une vie très (trop ?) bien remplie, qu’un « incident » dont on ne pourra jamais connaître les tenants et aboutissants. J’évoque ceci parce que mon meilleur ami, à la fidélité parfaite, s’est laissé aller, récemment, à évoquer cette histoire de « viol sur mineure » dans laquelle Polanski aurait été impliqué.

À la délicieuse table où nous étions invités, après que j’ai dit mon admiration pour cet homme, notre hôte ayant eu le privilège de rencontrer Polanski dit alors ce que tout le monde sait sur la Côte Ouest et à Hollywood. Une jeune fille de 14 ans en fait souvent plus de 18 et des parents peu scrupuleux n’hésitent pas à jeter ces gamines dans les piscines de ces célébrités pour extorquer à celles-ci quelques millions de dollars ensuite. Polanski n’a pas pu aller chercher son Oscar à Hollywood, la plainte des fameux parents est toujours valide et, dans une Amérique telle que nous la connaissons aujourd’hui, quel plaisir c’eût été pour les ligues d’extrême droite qui fournissent à «W» les doctrines que son cerveau diminué par le Texas et l’alcool ne peut concevoir seul.

Polanski avait 6 ans lorsque les Nazis ont envahi la Pologne. Il n’a dû qu’à son énorme instinct de survie qui lui serait bien utile lorsqu’il découvrira sa femme Sharon Tate égorgée et le ventre, portant leur enfant, ouvert par Charles Manson et sa joyeuse équipe, de s’échapper du ghetto de Cracovie au moment où les représentants de la race supérieure allaient le mettre, lui aussi, dans un train avec aller simple vers Auschwitz. Il avait vu sa mère partir.

C’est, à peu de choses près, l’histoire vraie de ce Szpilman, pianiste de grand talent, dans le ghetto de Varsovie, capitale de ce pays qui ne conserve que trois mille des trois millions de Juifs qui y vivaient avant la guerre. Quand Polanski trouve ces mémoires de Szpilman, il a enfin le support du film qu’il voulait faire depuis longtemps sur le génocide des Juifs. C’est un très grand film, qui ne souffre d’aucun défaut, réalisé par un très grand professionnel, un très grand réalisateur, dont il serait bon de revoir les premiers travaux, Le Couteau dans l’Eau, Cul-de-Sac et Répulsion, sortis à prix avantageux récemment. J’ai vu et revu le film, avec la même émotion, le même bonheur profond, la même tristesse intense.

Il faut regarder le documentaire « Une histoire de survie ». On découvre Polanski, dont j’ignorais qu’il fût juif avant ce film, homme de génie, refusant la simplification, parlant des salauds et des bons, Polonais, Nazis, Juifs. Cet homme, dont la petite taille surprend lors des scènes de tournage, tant son charisme est immense, est un juste, un homme de cœur, un grand artiste, un type bien. Merci Monsieur Polanski.



M. & Ms. Smith, Alfred Hitchcock 1941
Alice Adams, (Désirs secrets), George Stevens, 1935
Collection, RKO, Éditions Montparnasse vidéo

Le pari de Montparnasse Vidéo, avec cette collection RKO, est d’offrir, à un prix public accessible (15), des trésors du cinéma américain enfouis dans des catalogues difficiles d’accès. Les opérations financières auxquelles ont été soumis les studios de Hollywood depuis toujours font que des milliers de films dorment dans des caves au degré hygrométrique particulier et y pourriraient à terme sans ce DVD, qui nous est cher.

À ce prix public, pas de bonus somptueux qui, ici, serait d’ailleurs superflu. L’introduction par un M. Serge Bromberg qui donne quelques mots sur chaque film suffit.

Le Hitchcock n’est pas un Hitchcock, pas un de ces films magnifiques qui restent des classiques incontournables. C’est un film « fait par » le gros Alfred sur commande, il filme simplement un script.
C’est le seul film de ce genre, la comédie américaine, du grand réalisateur. Sans sa patte, on pourrait se passer de ce film, qui n’est pas un chef d’œuvre, loin s’en faut. Cette peinture, très bien faite, du comportement amoureux de la femme américaine qui aurait besoin d’une sauce romantique à la codification très précise, est agréable et, surtout, montre le génie de Hitchcock à chaque plan.

Alice Adams (pourquoi ce titre français, Désirs secrets ?)
est une autre peinture sociale américaine, celle d’une petite ville du Sud au sein de laquelle les ragots vont bon train et où la vie est conditionnée par la réussite. Rien de transcendant, mais un très bon moment à revisiter cette époque des années 30 et surtout de se repaître du visage magnifique de Katharine Hepburn, radieuse. Et rien que pour ça !



La Fleur du Mal, Claude Chabrol MK2

En traitant le film depuis l’idée qui lui donnera naissance jusqu’à son « S.A.V. », Karmitz permet à Chabrol, et surtout à chacun de nous, de profiter d’un cinéma d’auteur libre des contraintes économiques habituelles de cet art qui est aussi une industrie. La Fleur du Mal est un film de Chabrol, produit et distribué en salles par MK2 et en DVD par MK2.
J’ai manqué, parce que je n’ai pas réagi assez vite, ce film en salle, et dans la salle MK2 Grande Bibliothèque, voulant tester les « fauteuils câlin » de cette nouvelle salle. J’ai vu un autre film et, quelques mois plus tard, m’est parvenu le DVD. Voilà comment ne pas laisser un film disparaître. J’aime Chabrol, je l’ai dit ici même, ce film est le 50° je crois, le 12e avec Marin Karmitz qui, je l’ai appris par l’excellent bonus, a mensualisé Chabrol. Je renvoie le lecteur au papier de Chabrol dans Libération dont j’avais fait mention dans le dernier numéro de Verso. Vive ce cinéma artisanal, bien, très bien fait, à voir, bien entendu.

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Guillaume Boisdehoux
mis en ligne le 16/11/2003
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