Dans un
roman paru en 2000, Rezvani imaginait qu’un
certain Bergamme s’est emparé du
célèbre tableau de Courbet. Extrait
: « Plus d’Origine du monde ! Plus
de ces groupes conduits par de prétendus
historiens de l’art leur expliquant que ‘ce
tableau est le point d’aboutissement de
toute la peinture ayant pour objet la représentation
de la femme’, et qu’au-delà de
cette Origine du monde il ne pourra enfin subsister
qu’un art dégagé de tout
sujet, et même plus d’art du tout
: vidéos, installations… mais ce
qu’on a nommé jusqu’à présent
peinture, jamais plus…» Le roman
de Rezvani s’inscrivait dans une poétique
du désastre qui n’était pas
sans fondements : les nouveaux moyens techniques
utilisés par les « plasticiens » étaient
ceux de la reproduction en série. Nous
vivions une période inquiétante
de désacralisation de l’unique et
d’abandon des valeurs liées à l’individualité qui étaient éclairées
alors de manière sinistre par les perspectives
de clonage humain. Plusieurs expositions, comme
Voilà, le monde dans la tête au
Musée d’Art Moderne de la Ville
de Paris se résumaient en des proclamations
de la « mort de la peinture ». Huit
ans après, il semble que le ciel s’éclaircit.
Les peintres ont pris acte de l’arrivée
des nouveaux modes d’expression. Souvent,
ils les utilisent parallèlement à leurs
moyens traditionnels, et si certains entendent
se consacrer exclusivement à la peinture,
c’est parce qu’ils ont la conviction
qu’il y a des choses qui ne peuvent être
exprimées que par elle. Il y a longtemps
que la peinture ne prétend plus à une
hégémonie, mais encore fallait-il
qu’elle retrouve toute sa place dans le
champ de l’art. Nous y sommes : grâce à des
institutions qui n’ont plus peur d’aller à contre-courant,
grâce à des galeristes comme Daniel
Duchoze, voici de vrais peintres, de purs peintres,
mis en lumière pour notre plus grand plaisir
: Yves Crenn, Philippe Garel, Jean-Pierre Le
Bozec, Denis Rivière, Vladimir Velickovic
ne sont plus des résistants contraints
au repli tactique. Ils passent à l’offensive,
et nous démontrent que décidément
nous ne pouvons pas nous passer de peinture.
Glorificat Pictura ! |