Myriam Dao
Lorsque j’ai fait le portrait du slameur Lord Eraze à Monumenta, nous avons d'emblée pensé à une des figures de la Révolution haïtienne. Ce Portrait avec bicorne pourrait révéler une appropriation culturelle de cet objet, du même ordre que celle, hautement symbolique du drapeau des Confédérés que décrit Percival Everett dans une nouvelle magnifique The Appropriation of Cultures[7]. En conclusion, pourrais-tu me donner un éclairage sur Haïti ?

Régine Cuzin
A propos du bicorne, Huang Yong Ping dit s’être inspiré de la bataille d’Eylau, une victoire arrachée au prix de très lourdes pertes humaines. Mais peu de Français savent que l’une des grandes défaites de Napoléon Bonaparte fut la bataille de Vertières, dans la partie nord de l’île de Saint-Domingue (aujourd’hui Haïti), en 1803. Pour que naisse la première République Noire, à Haïti, le 1er janvier 1804, il aura fallu, entre autre, l’incroyable courage et la résistance acharnée des troupes du général haïtien Jean-Jacques Dessalines[8] qui firent capituler le général Rochambeau, envoyé sur place pour mettre fin à la rébellion provoquée par le rétablissement de l’esclavage dans les colonies françaises en 1802 – sur ordre de Napoléon Bonaparte.

[7] Percival Everett, The Appropriation of Cultures, short story, 2004 www.graywolfpress.org/blogs/appropriation-cultures-percival-everett
[8] Le portrait de Jean-Jacques Dessalines, par le peintre haïtien Édouard Goldman a été présenté dans les galeries nationales du Grand Palais, à l’occasion de l’exposition « Haïti. Deux siècles de création artistique », du 19 novembre 2014 au 15 février 2015, dont Régine Cuzin était la commissaire avec Mireille Pérodin-Jérôme.