Une réinterprétation kitsch, en vidéo, des grands classiques de la peinture ?
L’art vidéo, porté par un pionnier comme Nam June Paik, dont Bill Viola se réclame pourtant, est un art dévolu à l’innovation, à la création d’une écriture propre au service de thématiques actuelles, propres à notre époque. Matthew Barney a construit, lui, un univers très personnel, intégrant des éléments symboliques très contemporains. Philippe Parreno quant à lui, dans « Zidane, un portrait du XXIe siècle » 2006, co-réalisé avec Douglas Gordon, déploie dans cette vidéo à la fois le temps et l’espace, et syncrétise tout à la fois les génies de la télévision, du cinéma et des nouvelles technologies.
En revisitant les thématiques classiques de l’histoire de l’art, Bill Viola se situe dans une continuité.
Ce faisant, il ne semble pas éviter le piège d’une réinterprétation de thèmes trop familiers : le Kitsch.
Il y a dans les deux ascensions présentées, - « Tristan’s Ascension » 2005 et « First Light » 2002, quelque chose qui pourrait relever du Kitsch, au sens où ce mot désigne « des objets de mauvais goût, agrémentés de décorations superflues, qui copient le plus souvent des œuvres reconnues comme des classiques ».
A voir ces hommes s’élever vers le haut en position verticale ou horizontale on ne peut s’empêcher de penser au magicien David Copperfield en train de s’envoler ? C’est exactement la même chorégraphie les bras le long du corps, le torse bombé…
Le Christianisme réduit à des images caricaturales perd ici toute sa force. On se demande si Bill Viola est sincère, ou volontairement édifiant...
Veduta
Une clé de lecture peut être dégagée devant l’exposition du Grand Palais. Et si Viola ne nous offrait que des vedutas, ces fenêtres ouvertes dans les peintures de la Renaissance, allégories du Profane ?
En cela, l’œuvre « Catherine's Room » de 2001, polyptyque sur 5 écrans qui présente l’activité d’une même femme à cinq moment de sa vie, nous éclaire, littéralement. Cinq « chambres », comme autant de pièces vues dans une perspective frontale, s’ouvrent sur cinq petites fenêtres, qui nous dévoilent un arbre sur fond de ciel, à différents moments de la journée, de la vie.
Finalement, cette œuvre est à l’image de tout ce que Bill Viola nous offre au Grand Palais : chaque écran étant lui-même cette veduta, selon la terminologie italienne qui désigne «ce qui se voit » et par extension «comment on le voit » : ces vues frontales ne seraient rien d’autre qu’une mise en scène de la vie…littéralement, des perspectives…
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