L’Odyssée à travers l’histoire de l’art de Bill Viola s’arrêterait-elle au XIXe siècle ? On en arriverait presque à se poser la question : pourquoi pas Bill Viola au Musée d’Orsay ?
Il est à noter que Bill Viola, dans ces travaux d’avant 2000 et plus particulièrement dans l’installation « The Sleep of Reason » est le plus sincère dans son expression et au plus proche d’une locution spécifique à la vidéo qui trouve là une évidence à la fois plastique et sémantique. Malheureusement cette installation était défectueuse le jour de notre visite. C’est courant concernant les expositions qui montrent des images sur toutes formes d’écrans…On peut malgré tout en parler d’autant plus qu’elle ne nous est pas inconnue, elle a été montrée en 1990 à Jouy en Josas à la fondation Cartier.
Curieusement « Ascension » datée de 2000, est un élément de cette installation où l’on voit l’homme s’enfoncer dans l’eau puis remonter lentement vers la lumière…peut-on parler de relecture ?
Une iconographie tissée d’archétypes renvoyant à des images religieuses trop souvent définies comme « métaphysique » déploie un monde ancré dans les sensations et les affects de Bill Viola dont l’expérience étant enfant d’une NDA semble le prétexte sinon la justification de son œuvre.
Ce faisant, il se situerait dans la mouvance des artistes « Under Water », - dont René Hallen, Radka Leitmeritz sont en quelque sorte les plus représentatifs, qui figent des personnages flottant dans l’eau dans des costumes aux couleurs électriques de la palette des Nabis, et Désirée Dolron, qui dans « Gaze » en 1996 a photographié des personnes sous l'eau, coupées de leurs perceptions, expérimentant parfois une transe proche des transes religieuses.
Mais par delà les partis pris esthétiques qu’il s’approprie, pour Bill Viola, l'art ne serait rien d’autre qu’une voie de médiation vers Dieu, ce qui pourrait le rapprocher d’un Maurice Denis, dont l’œuvre est profondément imprégnée de Christianisme.
Allégories et thématique des Nabis
"In short, landscape is the link between our outer and inner selves", nous dit Bill Viola.
Les paysages chez Viola semblent moins réels que l'interprétation d'un « paradis perdu ». Comme Maurice Denis s’y était attaché en 1890, il explore les voies du symbolisme, tel ce chemin initiatique qu’empruntent les marcheurs de « The Path » entre des arbres, qui semblent les mener vers la connaissance. Comme dans «Les Arbres verts » de Denis, les troncs rythment la composition, cette fois dilatée en un large plan panoramique.
On pense également au « Bois Sacré » de Puvis de Chavannes.
L’une des cinq séquences visuelles du cycle d’images « Going Forth by Day », - 2002 dont l’artiste nous propose de les regarder individuellement ou dans leur totalité s’intitule « The Voyage ». On peut y voir une femme âgée, assise, qui attend son mari pour embarquer vers le large. Un plan largement ouvert nous le montre très lumineux. On est loin de la vision obscure de « L'ile des morts » d’Arnold Böcklin, on s'attend presque à voir le vieux couple, qui se réjouit de ses retrouvailles, embarquer pour Cythère, tant le ciel est dégagé et l'horizon serein.
|