Chemins,
Michèle Katz, Jean-Luc Chalumeau, Area. |
Michèle Katz a imaginé un univers
plastique où les figures humaines ne sont
plus que des silhouettes déformées, à la
fois effrayantes et effrayées, qui semblent
fuir un désastre sans nom. Jean-Luc Chalumeau
nous introduit avec perspicacité à ce
microcosme bouleversant qui tire sa substance
de la mémoire obsédante de la Shoah
que lartiste vit à travers la poésie
déchirée de Paul Celan : il réaffirme
la nécessité de prendre un sens
et une profondeur face au spectateur. Le Chemin
de Michèle Katz est une épreuve
: il procure autant de douleur que de ravissement.
Ce serait là lesthétique
juste pour notre temps. |
N.d.T. |
Anthologie 1945-1990,
choix, traduction et présentation par C. de Frayssinet, Points,
Seuil. |
Lanthologie poétique conçue par Claude de Frayssinet
a le mérite de présenter un ensemble dauteurs
de laprès-guerre dont la plupart sont peu connus, exception
faite de Foix ou de Goytisolo. Son anthologie inclut les novisimos
et cest bien de pouvoir découvrir lultime génération.
Je regrette seulement que certains poètes de talent soient
oubliés, en particulier Ana Becciu. |
En
français dans le texte |
Le Fabuleux roman du théâtre
de la Huchette, Gonzague Phélip, Gallimard |
Gonzague Phélip a eu lheureuse idée de produire
la grande histoire dun petit théâtre parisien,
La Huchette. Ce dernier sest rendu immortel pour avoir joué pendant
50 ans La Cantatrice chauve de Ionesco. Bien sûr, depuis sa
fondation, dautres pièces ont été mises
en scène, dAudiberti à Courteline et Tchékhov.
Cet opuscule donne la nostalgie du Paris des années 50
|
Le Génie du lieu 1 -
2,
OEuvres complètes V - VI,
Michel Butor, Editions de la Différence. |
Les oeuvres complètes de Michel Butor viennent de senrichir
de deux nouveaux volumes. Réunis sous le titre de Génie
du lieu, ils recueillent des livres tels que Réseau aérien,
Description de San Marco, Mobile, Où, Boomerang, entre autres.
Conçus entre 1960 et 1970, ils sont remarquables par une volonté de
fondre dans une seule et même architecture des formes différentes
: roman, poésie, journal intime et récit de voyage.
Après lexpérience du nouveau roman, Butor en
est venu à un travail purement expérimental. Le problème
que pose ces ouvrages est quils nont pas abouti à une
forme tendue et intense : on a souvent limpression dune
structure distendue, relâchée parfois, dune polysémie
se traduisant souvent par une logorrhée coupable. Cest
regrettable car Butor est vraiment un inventeur. On a bien observé sa
difficulté à demeurer dans le moule dune construction
rigoureuse dans ses premiers romans. Mais linverse ne lui rend
pas mieux service. Une chose est vraiment passionnante : son obsession
des couleurs. |
Dix-sept têtes,
Bruno Edmond, Diabase. |
Quand je lis : « Bruno Edmond nous propose un récit
poétique onirique proche de lunivers de Kafka »,
je suis envahi par un sentiment de colère : il ny a
dailleurs rien de commun entre ce livre et lécrivain
pragois. Mais on le lira néanmoins avec plaisir car on y découvre
un lien avec le surréalisme, le fantastique et la littérature
de labsurde. Il y a chez lauteur un Jérôme
Bosch qui sommeille et cela ne peut que nous ravir. |
Le Petit séminariste
Poésie, Flammarion
LImmédiat labile
Polyphonix/Nèpe
Animaux industrieux
Auxeméry volumen, Flammarion |
La poésie française semble en mal dun souffle
nouveau. Mais encore faut-il observer de près ce quelle
nous offre. Quelques exemples se présentent pour nous prouver
quil existe une nouvelle poétique. Dans Le Petit séminariste
(Poésie, Flammarion), Gérard Cartier procède à un
dialogue très sophistiqué entre des récits en
prose et des moments versifiés. La perspective quil
a choisie est celle dune interrogation saturée de doutes
sur le réel et sa représentation. Avec lentêtante
présence de la nature et la vision nostalgique de la culture
anglaise traduite dans la réalité de la ville. Cest
intense et prenant. Jacqueline Cahen, en écrivant LImmédiat
labile (Polyphonix/Nèpe), illustré par Jean- Jacques
Lebel, sinscrit dans loptique de la poésie narrative.
Mais lunivers quotidien nest pas son objet : elle sintéresse
plutôt au mouvement de la pensée, à ses extravagances,
aux rêves, les incongruités du monde. Bernard Heidsieck
a raison de dire : « Ce labilisme a la vertu de
sexercer, par les évocations successives, tant physiques
que de façon imaginaire et spéculative de façon
toujours juste, vive, subtile ». Quant aux Animaux industrieux
Auxeméry (volumen, Flammarion), ils renferment
une mythologie singulière placée à lenseigne
du bizarre, associant la haute métaphysique et une sorte de
chamanisme omniprésent. Lauteur dépeint une Terre
générant une vie des origines, complexe et tourmentée,
riche de métaphores et chargée de vision angoissantes. |