Une anthologie,
Haroldo de Campos,
traduite et présentée par
Inès Oseki-Dépré,
Editions Al Dante |
Les Éditions Al Dante proposent une anthologies des poèmes de Haroldo de Campos, créateur du groupe brésilien Noigandres disparu en 2001. Ce qui fait lintérêt de ces pages, cest que lauteur, qui passe pour le principal représentant de la poésie concrète dans son pays, a pris en compte la tradition du moderne, cest-à-dire sans exclusive et sans volonté de rompre le fil rouge dune grande histoire inachevée.
Doù la grande diversité de ses créations et un désir constant dexpérimentation, cest-à-dire un désir de tenter de créer des espaces de langage incongrus ou inattendus. Voilà un écrivain à découvrir car il nest pas réservé à une petite secte poétique.
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Mauvaise herbe,
Claire Beyer, tr. Amélie Fery, Métro,
Editions Jacqueline Chambon |
Avec Mauvaise Herbe, Claire Beyer a signé un livre émouvant, écrit à la fois avec beaucoup de réserve et un style incisif. Cest lhistoire dune petite fille allemande, Vroni, qui grandit pendant les années cinquante au sein dune famille éprouvée par la guerre. Au centre du drame, son père, gravement mutilé, qui ne peut plus exister quà travers la rage, limpuissance, la violence et la colère. Vroni en souffre beaucoup, mais ne peut trouver de secours auprès de personne dans sa propre famille. Elle ne trouve de refuge possible quauprès de son professeur de piano, un Juif extravagant qui sidentifie à Mozart, un vieux professeur dhistoire qui la prend en affection et du Russe Ivan. Au coeur de ce désastre absolu, elle se construit un univers propre et parvient à supporter ce grand paysage de ruines
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En français dans le texte |
uvre poétique I,
Abdellatif Laâb,
préface de Jean-Luc Wauthier,
Editions de la Différence |
Les Éditions de la Différence viennent de faire paraître le premier tome des oeuvres poétiques dAbdellatif Laâbi, le grand poète marocain né à Fès. Depuis Le Règne de barbarie (1967), jusquà Lumière de la caverne, une prose de nature philosophique (mais surtout une révélation de lesprit de sa poésie), nous avons la faculté de comprendre et surtout déprouver la singularité de sa démarche qui est bien peu formelle et qui est avant tout une réflexion sur lacte décrire et sur le regard quun poète doit porter sur le monde, sur ses drames (loppression, la captivité, lexil, la révolution, lémigration, car il sagit là du journal dun révolté) et sur ses espoirs déçus. OEuvre oscillant entre la dénonciation de linjustice et de la terreur et le récit égotiste de lexpérience personnelle de lécrivain, elle nous force à interroger la culture arabe moderne avec toutes ses contradictions. OEuvre forte et engagée, oeuvre qui ne se paie pas de mots, oeuvre qui sinterroge sans cesse, la poésie de Laâbi est une entreprise qui bouleverse sans jamais chercher à jouer sur les bons sentiments. |
La petite et la grande histoire |
Les Grandes horizontales,
Virginia Rounding, tr. B. Dunner,
Anatolia/Editions du Rocher. |
Le titre français du livre de Virginia Rounding, Les Grandes horizontales, est une véritable trahison de lesprit que cette dernière a voulu lui donner. En effet, elle explique que ces demi-mondaines qui ont fait fureur au XIX e siècle en France nont pas été que des femmes qui vendaient leur corps contre un train de vie et parfois de véritables fortunes. Il nest que de songer à la Nana de Zola. Ce sont souvent des courtisanes au sens plein du terme, parfois des femmes cultivées. On songe à la figure dApollonie Sabatier, qui organise des soirées où Gautier avait entraîné Baudelaire. Celle-ci inspire à ce dernier plusieurs poèmes et une relation amoureuse sinstaure entre eux. Et là, lauteur des Fleurs du mal se dérobe devant la passion de cette femme qui la bouleversé. Et que penser de Marie Duplessis, celle qui est devenue limmortelle Marguerite Gautier de La Dame aux camélias sous la plume de Dumas fils ? Elle aussi ne répond pas exactement aux définitions simplistes de ces femmes pour lesquelles certains nont pas hésité à se ruiner. Elle sont lultime incarnation de la grande courtisane de la Renaissance, qui pouvait être, comme Louise Labé, non seulement une femme desprit mais une grande poétesse. Une incarnation à la hauteur de ce XIX e siècle car ces superbes créatures nétaient plus certes des femmes de lettres, mais elles tenaient des salons où se pressait le tout-Paris. Hélas, leur fin est souvent pathétique, comme celle de Cora Pearl, qui fut la maîtresse du prince Napoléon ou celle Blanche de Païva, qui se fit construit un extravagant et somptueux hôtel particulier sur les Champs-Élysées dès quelle a eu prise sur le jeune comte Guido Henckel von Donnersmark. Cette étude est remarquable et permet de percevoir sous un angle neuf cette période de notre histoire où la femme dissolue était associée aux rêves les plus fantasques. |
Manolete,
le calife foudroyé,
Anne Plantagenet,
Ramsay |
Manolete a été une étoile filante au firmament de la tauromachie. Il est mort en 1947 en Andalousie, à trente ans, frappé par un taureau noir. Ce héros des arènes de la péninsule ibérique et de lAmérique latine, a pris une tournure romanesque quAnne Plantagenet raconte avec mordant et beaucoup de respect et même damour pour tout ce quil a représenté pour lart taurin. Cet homme quon croyait sans destin est devenu un torero légendaire (il a tant impressionné Abel Gance que ce dernier lui a consacré un film) et, du même coup, une figure scandaleuse. Ses amours tumultueuses avec Lupe Sino défraient la chronique. Voilà un superbe hommage à Manuel Rodriguez Sànchez, ce natif de Cordoue qui, encore aujourdhui, fait lobjet dun véritable culte. Il ne fut ni beau, ni doté dun caractère digne dun roman dErnest Hemngway. Mais, au milieu de larène, il fut un héros, presque un dieu. Et cela, Anne Plantagenet le fait éprouver dans les pages quelle lui consacre. |
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