version impression |
participez au Déb@t |
Les artistes et les expos
Le rêve de Joseph K |
|
Par Raphaël Gatel |
Le Rêve de Joseph K., Collégiale Saint-Pierre, Orléans/Eglise Saint-Etienne, Beaugency (17 février-25 mars). Catalogue : 15 euro |
Commencée au Musée du Montparnasse en 2002
lexposition dédiée à Franz Kafka vient dêtre présentée à Orléans et à Beaugency.
Francesco Magris en fait le récit et trois artistes, Etienne Assénat Solange Galazzo et Gilles Ghez, dévoilent leur relation à lauteur du Château.
Kafka aurait aimé. Nous parlons de lexposition qui a pour titre Le rêve de Joseph K et qui a eu lieu simultanément dans la magnifique Collégiale Saint- Pierre-le-Puellier à Orléans et dans la très belle église de Saint-Etienne à Beaugency, grâce à linépuisable énergie de Gérard-Georges Lemaire qui avait organisé deux autres expositions dart moderne dont le thème sinspirait de Kafka : en 2002 au Musée de Montparnasse avec le titre Métamorphoses de Kafka et en 2006 dans quatre villes du Sud-Ouest de la France, exposition cette fois-là consacrée exclusivement au personnage, à ses obsessions, à ses phobies, à ses cauchemars, plutôt quau paysage culturel de lépoque où a vécu le grand écrivain de Bohème, et intitulée K
comme Kafka.
La nouvelle exposition a pour objectif celui de faire revivre lunivers onirique de Kafka et présente des exercices de pyrotechnique artistique où se superposent des installations, des dessins, des huiles, des gravures et dautres formes dexpression de lart contemporain. Lexposition comprend aussi bien une succession de références explicites à loeuvre de Kafka que des propositions moins immédiates, qui dans tous les cas nexcèdent pas dans le goût pour labstrait esthétisant et absolu. Fouille psychologique approfondie et créativité sappuyant sur linstinct éclair de lartiste alternent équitablement. Le monde énigmatique kafkaïen apparaît dans chacune des oeuvres, suscitant chez le spectateur des échos et des reflets mélancoliques et inquiétants. Des domaines dinvestigation les plus disparates mais liés par des intentions communes : redonner vie aux cauchemars, aux obsessions, à la mélancolie de lauteur du Procès, en particulier à son rapport conflictuel avec le sommeil qui a joué un rôle déterminant dans son écriture et dans ses rapports personnels. Bien que tout artiste le fasse à sa manière en fonction de son expressivité artistique et des zones grises de lunivers kafkaïen qui le hantent le plus.
Ainsi, avec ses acryliques, Luce Delhove retrouve dans les paysages de sa Belgique natale les ambiances grises et sinistres de certains récits. Dans son installation, Daniel Dezeuze se fait envoûter par lidée du vide intimidateur. Etienne Assenat se fixe pour objectif de combler lhiatus non résolu entre lauteur et le pouvoir évocateur de son oeuvre, tandis que Valerio Cugia élargit le spectre de Kafka homme avec une série dhuiles représentant les membres de sa famille. On retrouve des représentations de lécrivain dans les oeuvres de Gerardo Dicrola, de Paul Harbutt, dÉtienne Assénat et de Benoît Tranchant. Linsomnie, le rêve et le cauchemar sont le prétexte des peintures dAndrea Fortina, lidée dune réalité qui se métamorphose continuellement sous-tend les aquarelles de Gianni Burattoni et les huiles de Nathalie Du Pasquier, la sensation de vide et de néant transparaît de manière inquiétante de la boîte de Gilles Ghez tandis quAnne Grouben retrace les cauchemars kafkaïens en les éclairant dune lumière douloureuse mais rédemptrice. Hans Bouman exprime son angoisse par le moyen de ce quil définit lui-même comme « une pellicule cinématographique animée », tout comme Jack Vanarsky a recours à la technique de la caméra subjective pour décrire la pièce « non pas où vivait Kafka mais qui lhabitait ». Avec sa Barque du chasseur Gracchus, Patricia Reznikov propose sur papier lodyssée de la vie du chasseur Gracchus ; Santiago Arraz avec sa série dacryliques rappelle la relation de lunivers kafkaïen avec la société postmoderne. Sergio Birgia opte pour la technique de la xylographie afin de conjuguer au présent ses thèmes kafkaïens préférés. Le périple de dédales souterrains est en revanche au centre des techniques mixtes de Solange Galazzo. Lempreinte légère du rêve, opposée à la pesanteur de la réalité, est présente dans loeuvre de Catherine Lopès-Curval, tandis que Claude Jeanmart voit dans la Description dun combat loeuvre la plus en syntonie avec sa conception de la peinture. Le triptyque de Démosthènes Davvetas est un jeu dalter ego qui semblent se suivre dans des séries tantôt dapparitions, tantôt de disparitions. Le diptyque dOlivier de Chambris sinspire des Lettres au père et fait prévaloir un rouge sombre et tempétueux. Laurie Karp reproduit sur peau dagneau les sentences qui, dans la Colonie Pénitentiaire, sont gravées sur peau humaine. Arthur Aeschbacher propose, quant à lui, un collage conjuguant le thème des métamorphoses avec le mythe de Faust. Les acryliques colorés de Bernard Barillot, le souffle érotique léger de Bernard Lacombe, les spectres nocturnes de Zwy Milshtein et les installations cauchemardesques de Vladimir Skoda complètent lexposition.
Rêves, fantaisies sombres, cauchemars, labyrinthes constituent lossature de lexposition où les thèmes traditionnels de Kafka trouvent à la fois substance et refoulement. Les thèmes chers à lécrivain de Prague, provisoirement soustraits, nous sont restitués à travers le filtre personnel de chaque artiste suivant ses fantaisies et ses techniques sans jamais trahir Kafka toutefois, dont les écrits peut-être plus que chez nimporte quel autre auteur laissent une marge très ample à linspiration en vertu justement du caractère inachevé de son oeuvre. Mais cet inachevé se rencontre parfois aussi comme thématique de loeuvre dart absolue, qui naît dans lespace de liberté où elle se meut comme cela se passe dans les rêves où le mélange avec la réalité est fragmentaire et fruit dune errance anarchique de lesprit. |
lire la suite > |
Francesco Magris |
mis en ligne le 30/07/2007 |
Droits de reproduction et de diffusion réservés; © visuelimage.com - bee.come créations |
|
Dossier
Franta
|
|