Les artistes et les expos | C’est
une singulière réunion de jeunes peintres que propose
la galerie Polad-Hardouin avec son projet « Holy Destruction »,
annoncé pour début Septembre. Expression manifeste d’un
besoin viscéral de liberté, ce projet témoigne
d’un désir partagé par une même génération
(née pour l’essentiel autour des années 1970) de
renverser, de détruire, toutes limites qui viendraient entraver
les « possibles » : de créer, d’exister. Détruire les limites, c’est déjà refuser de se borner à l’enfermement d’un unique territoire. Si Holy Destruction se déroule à Paris, elle réunit en effet l’œuvre de peintres venus des quatre coins du monde (Allemagne, Angleterre, France, Espagne, Canada mais aussi : Etats-Unis, Chili, Arménie, Australie ou Chine). L’exposition marque ainsi clairement une volonté d’ouverture internationale. Manière de rappeler aussi - à tous ceux qui voudraient encore mettre sur la table le jeu du spectre post-duchampien (vieux jeu, spécifiquement français, qui jadis consistait à faire souffler sur l’hexagone un vent de mépris contre la peinture) – que la donne a changé. Oui, laissons reposer en paix les spectres de tout bord ! C’est de vie dont il s’agit ici, et précisément d’amour, de désir de peinture ! Détruire les limites, c’est aussi renverser l’impossible de l’art. C’est se poser contre l’idée postmoderne d’un « impossible à créer » et d’un « impossible à peindre » (fléau de l’ère postmoderniste : croire que, face au trop d’images et à l’extension du musée imaginaire, tout serait déjà vu/déjà fait et qu’il ne resterait plus qu’à piller, tout et n’importe quoi de préférence. Ou encore : croire qu’il vaudrait mieux, face à la profusion des démarches extra picturales, de la photographie au conceptuel, cesser de peindre ou peindre, mais sans peinture !). Contre ces impossibles-là, Holy Destruction reflète la liberté - salutaire- de tout explorer, de multiplier les « possibles » de peindre. Donc de peindre quand même, contre ou avec cette omniprésence des images, et sans aucunes limites formelles. Les démarches réunies se nourrissent librement en effet de divers apports, issus du champ pictural (nombreuses et fécondes sont les filiations stylistiques, du surréalisme et pop art aux expressionnismes) ou pas (d’autres domaines de références se posent comme source de renouvellement : le dessin animé, la bande dessinée, la photographie, le cinéma, etc.). Détruire les limites, c’est enfin renverser l’Impossible de l’être. Holy Destruction c’est l’expression - salutaire - d’un besoin de vivre et de savoir l’homme, au risque de se brûler. Savoir le cycle infernal du même : la mort, l’absurde. Savoir l’aliénation de l’individu face au gouffre consumériste et face à l’omniprésence de l’image/de l’objet qui, par son « tout » est visible/accessible/monnayable, limite aussi et étouffe (notre corps, notre imaginaire). Etre peintre aujourd’hui, c’est donc savoir tout cela. Et exister ! Sans illusion. Sans pathos, avec légèreté ou humour même parfois. Sans pessimiste ni renoncement (fléau du postmodernisme encore : croire à l’impossibilité des « après », Auschwitz, la Fin de l’Histoire, etc.) mais plutôt dans une volonté dionysiaque profondément positive d’affirmer la vie et de se laisser emporter par la fièvre dévorante, jouissive, d’être au monde. Mais l’expression plastique de ce désir de liberté,
nourrie d’une même rage d’exister, ne se donne au regard
que de manière toujours singulière et prend corps dans des
oeuvres très différentes. Holy Destruction est le
reflet de cette multiplicité féconde, comme en témoigne
avec pertinence la diversité des artistes sélectionnés. |
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« Destruction salutaire » | |||
par
Amélie Adamo |
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mis en ligne le 23/09/2009 |