Valérie Pavia :
fantômes que fantômes ou les miroirs secrets
Que faire avec le bleu ? Car voici le bleu. Mais ce bleu, que peut-il faire ? Que peut-il donner ? Les vidéos de Valérie Pavia lui donnent mieux qu'un nom de Prusse : son identité. Celle-ci engendre celle de la vidéo. Grâce à lui quelque chose y cède. D'où vient que ce bleu est venu ? Des voyages peut-être ou de l'accident de parcours. Mais surtout de sa force aquatique. Son apparition est un bien-être. Il éloigne les précisions de temps et porte à la nostalgie. On peut presque parler de "bleu sépia". L'image n'est pourtant ni mystérieuse, ni secrète : elle montre. Elle montre qu'un bleu est venu, qu'il va. Le voici dans sa lumière. Changeant, découvert. Est-ce le début du jour ou de la nuit ? La lumière n'a-t-elle pas sommeil ? Le bleu est la mesure de l'image. L'image est sa mesure. Est sa démesure. Face à lui l'homme comme l'artiste elle-même redeviennent enfants. Mais ils trouvent en lui l'espace pour mûrir. Le bleu déplace le passé comme le futur. Il crée le murmure de par ses valeurs changeantes, les techniques mixtes et les bruits off. Il ne craint plus rien il avance. Il vit, craquant de peur à la lumière. Valérie Pavia (se) parle à travers lui. Elle l’outrepasse, elle va vers l’outrebleu passant du cinématographe lorsqu'elle est à l'étranger (cf. son "Sofia") à l'art-vidéo lorsqu'elle revient en France. Son bleu redevient cristallin. Il fait dériver de l'obscur à la lumière. Il courbe l'articulé. Il fait accepter à l'artiste l’inconnu(e) au fond d'elle-même et tant pis pour le temps à gagner ou à perdre. Il faut risquer le montage, empoigner cette poignée de bleu et le jeter plus haut.
Passage, trace, cheminement des pigments, des liants et de l'eau. Les vidéos de Valérie Pavie parlent de l’air et de l’eau, de la réalité et du rêve. C’est de ce dernier que l’artiste veut se rapprocher afin de métamorphoser le premier. Elle se dresse contre l’angoisse du temps en le transformant non sans tiraillements en espace de sérénité et de lumière. Elle plonge avec délices, avec effroi, dans la couleur de l'eau qui l'accompagne, la déborde ou la disperse. Ses émotions et son attirance sensuelle vont vers ce bleu qui la guide. Cette couleur reste majeure autant dans ses nuances que dans ses glissements, ses mouvements de corps, de visages et d’eau. Il permet de suggérer la violence et la douceur et pousse insensiblement vers un sentiment océanique de la vie par l’autoportrait en creux qu’il dessine. Il devient aussi une couleur « abstraite » qui par delà son rappel aquatique ou céleste évoque une manière particulière d’exprimer les abysses de l’être aussi profonds, angoissants que source de sérénité.