« [L’abbé Gévresin ] lui montre la bague qu’il
tourne lentement entre ses doigts, expliquant à Notre-Dame le sens
de chacune des pierres qui lui dans la monture de, en préludant par
le jaspe vert, symbole de cette fois qui fit si pieusement accueillir, par
la Vierge, le message de l’angélique paranymphe ; ouïs
viennent la chalcédoine, qui réfracte les felx de la charité dont
son âme est pleine ; l’émeraude, dont l’éclat
désigne sa pureté, la sardonyx, aux flammes claires, qui se
confond avec la placidité de sa vie virginale ; la sarde rouge, qui
s’identifie avec son cœur saignant sur le Calvaire ; la chrysolithe,
dont les scintillements d’un or qui s’éverdume rappellent
ses miracles sans nombre et sa sagesse ; le béryl, qui décèle
son humilité…. »
Pierre-Joris Huysmans, la
Cathédrale
Autrefois, les peintres utilisaient parfois des animaux (les soies du cochon
blanc ou les queues d’écureuils pour fabriquer les pinceaux,
mais aussi la cochenille, qui est un insecte pour élaborer du rouge)
et, pour obtenir les coloris qui leur étaient indispensables, les
végétaux (le pastel, la garance), des concoction chimiques,
mais aussi des terres (les terres d’ocre en particulier) et beaucoup
d’ingrédients appartenant au monde minéral -, des terres
(les ocres jaunes et rouge, la terre verte, etc.) et des minéraux
qu’il fallait broyer avec beaucoup de patience et de force (l’expression « broyer
du noir », en français, vient de la préparation si longue
et pénible de la couleur noire obtenue à partir de graines
ou de sarments de vignes brûlés), d’aucuns étant
vulgaires, comme le plomb, avec lequel on faisait le blanc, d ‘autres étaient
assez précieuses, comme le porphyre, pour faire le rouge, ou le lapis-
lazuli pour faire le bleu (on avait recours aussi à la pierre d’azur
des montagnes, beaucoup moins belle). Et l’or, bien sûr, était
la matière la plus noble et la plus onéreuse. Le moine allemand
Théophile avait consigné au treizième siècle
bon nombre de ses recettes dans un important incunable et Cennino Cennini,
dans son Libro dell’arte, rédigé à la fin du quatorzième
siècle, avait réuni les principaux procédés utiles à la
peinture.
Avec les progrès de la science et plus particulièrement de la chimie, les couleurs se sont changées en de pures et simples formules, qu’on n’a pas cessé de perfectionner depuis la fin du dix-septième siècle, l’un des premiers procédés artificiels qui aient obtenu un succès universel, le bleu de Prusse, n’ayant plus cessé d’être perfectionné alors que beaucoup d’autres méthodes étaient inventées et manufacturées.