Bonnes feuilles
Jean-Luc Chalumeau publie ces jours-ci un nouveau livre, Chefs-d’œuvre méconnus des musées de France (éditions du Chêne).

Nous publions en bonnes feuilles l’introduction du nouveau livre de Jean-Luc Chalumeau qui paraît ces jours-ci aux éditions du Chêne : « Cent chefs-d’œuvre méconnus des musées de France ».

Chef-d’œuvre : « œuvre d’art particulièrement accomplie » nous dit le dictionnaire Larousse. Méconnu : « qui n’est pas apprécié selon son mérite », précise la même source. L’objet de ce livre est d’évoquer des peintures et des dessins (à l’exclusion de la grande variété des autres sortes d’œuvres d’art contenues dans les musées de France) qui me semblent à la fois particulièrement accomplis et pas assez appréciés. Quels que soient mes efforts d’objectivité, le choix proposé est évidemment subjectif : l’art est d’abord affaire de goût. En deux décennies de visites attentives, j’ai repéré environ un demi millier d’œuvres de cette sorte, appartenant à l’art européen, dont j’ai prélevé une centaine d’exemples.

Cette sélection est nécessairement tributaire de la nature particulière des collections des musées de France, liée à l’Histoire. La Révolution Française à ses débuts ne voyait guère, dans les collections des rois, des princes et de l’Eglise, que des « monuments élevés à l’orgueil, au préjugé et à la tyrannie ». Il a fallu qu’à la Convention une poignée de Représentants lucides, en particulier Dussaulx, osent défendre l’idée que soient « épargnés et conservés les monuments précieux pour les arts ». C’est à Roland, ministre de l’Intérieur de la jeune République (elle avait été proclamée le 21 septembre 1792 au lendemain de la bataille de Valmy) qu’il revint d’adresser aux corps administratifs, dès le 3 novembre, une circulaire affirmant la volonté officielle de sauvegarder le patrimoine artistique de la France. La Convention a aussitôt rassemblé les collections royales, princières et ecclésiastiques dans le Muséum central des Arts créé au Louvre.

Par la suite, les Autorités furent conduites à ajouter aux collections devenues nationales en 1792 d’innombrables chefs-d’œuvre, butins des armées révolutionnaires dans toute l’Europe : elles créèrent donc en province des dépôts d’œuvres d’art. C’est Bonaparte, Premier Consul, qui en établit la liste par le décret du 14 fructidor an IX (1er septembre 1801) : Lyon, Bordeaux, Strasbourg, Bruxelles, Marseille, Rouen, Nantes, Dijon, Toulouse, Genève, Caen, Lille, Mayence, Rennes et Nancy reçurent de nombreuses œuvres qui allaient constituer les fonds des musées des Beaux-Arts de ces villes. Même après les restitutions de 1815 organisées par la Restauration, ces fonds demeurèrent fort riches. Notons que si certaines des villes citées ne sont plus françaises aujourd’hui, des œuvres importantes des collections nationales y sont restées, par exemple la célèbre Mort de Marat, par David, qui se trouve toujours au musée de Bruxelles avec la mention « dépôt du Louvre » !

mis en ligne le 06/10/2010
pages 1 / 2 / 3 / 4
suite >
 
action d'éclat