L’horreur est humaine ?
Un dernier exemple de la démarche aussi troublante que pertinente
de l’artiste :
pour dénoncer les massacres perpétrés dans son pays natal,
le Serbie, dans les années 1990, l’artiste entreprend en public
de nettoyer un à un les ossements d’un immense charnier sanguinolent,
jusqu’à ce que chaque os retrouve une blancheur immaculée.
Il y a dans l’œuvre de Marina Abramovic cette force terrifiante d’évocation
qu’on trouve dans les textes de la Bible : on pense à l’Apocalypse
de Jean.
Côté bitte ou côté vagin ?
Telle est la question qui se pose une fois encore, lorsqu’on visite l’exposition
qui se tient au Centre Pompidou, consacrée à l’artiste anglais
Lucian Freud, qui se tient également en ce mois de mars 2010. Car des
bittes, il y a en a dans l’œuvre de Lucian Freud, des grosses bittes
peintes avec réalisme cru, qui de toiles en toile se succèdent
sur fond de nudité, des bittes bien visibles, car les sujets peints ont
tous les jambes bien écartées. Des vagins aussi, il y en a, des
vagins velus, et qui se surcroît ornent des corps d’un obésité repoussante,
car l’œuvre de Lucian Freud, s’inscrit aussi dans une veine
réaliste et crue : festival de bourrelets, de protubérances
charnues , de débordements pileux, de vision cadavérique de la
vieillesse, bref, une surabondance de chair , de mamelles, de ventres à double,
voire triple circonvolution.
Même sentiment que chez Marina Abramovic : encore une fois, l’envie
de vomir.
Seulement voilà, l’envie de vomir une fois surmontée, le
seul sentiment qui demeure est celui d’un ennui désespérant
et parfois un sentiment d’être victime d’une imposture face à la
répétition, de toile en toile, des mêmes sujets au moyen
d’une technique picturale qui somme toute n’a rien d’avant-gardiste.
Car voilà. Si on s’ennuie, c’est qu’il y sans doute
une raison. Et la question se pose. Qu’est-ce qui distingue la technique
picturale de Lucian Freud de celle de Franz Halz, de Courbet ou de Manet ?
Rien ! Ce constat est à la fois un compliment et en même temps
un aveu d’impuissance. Compliment, car il est indéniable que Lucian
Freud est un virtuose de l’imitation du réel et que sa technique
n’a rien à envier à celle des grands maîtres du passé.
Un aveu d’impuissance : un technicien du pinceau est-il pour autant
un artiste ? La réponse et non. Lucian Freud n’a strictement
rien inventé. Il fait de la peinture, une peinture figurative comme au
bon vieux temps, un point c’est tout. Il y a un nom pour ce type d’art :
l’académisme. La supercherie consiste ici à jouer sur la
laideur des modèles, leur réalisme outrancier, sur la forte présence
de bittes flasques et de vagins pileux, qui bien évidemment indisposent,
donne des hauts- le- cœur, et finalement indifférent, pour nous
faire croire à une esthétique vraiment singulière. Une telle
démarche s’appelle aussi de la pornographie : le contraire
du désir, le contraire de l’amour, le contraire de l’art.
Mettre des bittes et des vagins dans des toiles peintes, ça choque le
bourgeois, ça épate les gogos, ça peut même faire
des enchères record dans un monde où la provocation est devenu
une forme de consensus, mais ça n’apporte strictement rien à l’art.
Bien sûr l’académisme de la provocation se vend bien. Alors
il faut l’exposer. Triste credo !
Un dernier rappel : l’artiste le plus coté et le plus exposé à la
fin du dix-neuvième siècle s’appelait Meissonnier. Qui s’en
souvient encore ? L’art académique, c’est cher, mais,
heureusement, ça s’oublie vite.
Thierry Laurent
Quelques
liens vers le travail
de Marina Abramovic