Suivre une luciole (Virginie Le Touze)
A quoi il n’est pas inintéressant d’ajouter le
Littré :
1. Terme de science et de philosophie. Tout ce qui tombe sous les sens,
tout ce qui peut affecter notre sensibilité d'une manière quelconque,
soit au physique, soit au moral.
. “ M. le chevalier de Louville eut deux accès
de fièvre léthargique qui ne l'étonnèrent point ;
il avait coutume de regarder ses maux comme des phénomènes de physique
auxquels il ne s'intéressait que pour en trouver l'explication”.
[Fontenelle, Louville.]
. En médecine, tout changement, appréciable
par nos sens, qui survient dans un organe ou une fonction. Les phénomènes
de la circulation. Les phénomènes de la respiration.
0. 2. Tout ce qui paraît d'extraordinaire dans l'air,
dans le ciel. Les comètes, les météores sont des phénomènes.
0. 3. Ce qui est rare et surprenant.
0. “Le fond du système [de l'Église anglicane] effraye
le théologien : un roi pape, une papesse Élisabeth, quel phénomène
!” Mém. de Trévoux, 1725, t. I, p. 333]
0. “ Familièrement. C'est
un phénomène que de vous voir ici.
0. 4. Il se dit des personnes qui surprennent
par leurs talents, par leurs actions, etc.
0. “Phocion était à la fois grand
capitaine et grand homme d'État, phénomène auquel dans
ce siècle on n'était plus accoutumé”. [Condillac,
Hist. anc. II, 9]
. 5. Chose ou personne extraordinaire
qu'on montre à la foire. Phénomène vivant.
0. “La foire au pain d'épice a conservé le
privilège d'être le rendez-vous aimé de tout ce que Paris
et la province comptent de saltimbanques, de physiciens, de montreurs de phénomènes
et de curiosités de tous genres”. [Moniteur universel]
Vidéo, photographie, dessin, chant, musique, collage, écriture,
installation se côtoient sur une palette de poésie, de souvenirs,
de citations, d’allusions au cinéma en noir et blanc, au cabaret,
au music-hall et à la chanson d’amour. Tous registres du populaire
au lyrique. Tout en clin d’œil. On évite le plagiat. On
frôle le pastiche. On croit reconnaître. On découvre.
Une artiste est habitée.
Le parcours de VLT est atypique. Je ne connais pas d’équivalent.
Très vite elle nous fait oublier sa bio. On plonge dans l’oeuvre.
D’abord, les lignes d’épines de roses délicatement
collées sur le blanc d’un mur de la Villa Arson, en crescendo/decrescendo,
font écho à l’aphorisme « Qui s’y frotte, s’y
pique », mais en gommant dans le même temps l’agressivité des
pointes. Ceci est une ligne de dessin pour dire C’est la vie. Minutie
et précision obsessionnelles de dentellière.
Suit une pluie apprivoisée intra muros, qui tombe sur les visiteurs
qu’abritent des parapluies noirs. Fred Astaire n’est pas loin sur
le bout des lèvres. Puis les vidéos s’enchaînent,
je me souviens encore du gris de la brume nocturne de Pantomine, un mimodrame,
de son gros plan fixe sur son visage autofilmé qui passe en boucle avec
le texte et la voix de Jeanne Moreau sur ses lèvres « Je t’aime.
Je ne quitterai pas Julien. Tu sais que je serai là. Avec toi ». Ça
crée le trouble, entre extase et agonie.