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[verso-hebdo]
20-09-2012
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La lettre hebdomadaire de Jean-Luc Chalumeau |
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2012, l’année Boisrond |
L’année en cours aura été un grand cru pour François Boisrond : expositions au musée de l’Abbaye Sainte-Croix des Sables d’Olonne (mars-avril), à la Villa Tamaris de la Seyne-sur-Mer (juillet-septembre), à l’espace Jacques Villeglé de Saint-Gratien (octobre-décembre) et à la Galerie Louis Carré (mai-juin). Cette dernière a édité, comme d’habitude, un très beau catalogue sous le titre « Par Passion » et les responsables des trois premiers lieux ont réuni leurs moyens pour éditer, chez Actes Sud, une considérable monographie « François Boisrond » (312 pages). J’imagine que c’est à l’initiative de Robert Bonaccorsi, le patron de la Villa Tamaris, qui n’a pas son pareil pour créer les conditions de réalisation de belles éditions par ces temps de crise. Boisrond est né en 1959 : ses cinquante-trois ans coïncident avec une éclatante maturité artistique dont témoignent ces deux publications qui feront date. Je notais en janvier 1989, à la suite d’une visite de son atelier au cours de laquelle il m’avait confié que l’un de ses artistes préférés était Daumier, que Boisrond était (déjà !) un artiste fêté, qui réalisait une exposition tous les deux mois, était aimé du public et pas mal vu par la critique. De Daumier le caricaturiste, Baudelaire avait écrit qu’il a « poussé son art très loin, il en a fait un art sérieux », ce qui me conduisait à conclure : « Et si Boisrond était en train de faire de son imagerie des affiches, des tee-shirts et des spots TV un art sérieux ? A mon avis il en est fort capable ».
Vingt-trois ans plus tard, c’est fait. Boisrond est devenu un grand peintre sérieux, non sans de discrètes touches d’humour, avec de splendides peintures inspirées d’Ingres, Delacroix et Jean-Luc Godard. Ce fils d’un grand réalisateur de cinéma (Michel) remercie, à la fin du catalogue « Jean-Luc Godard, qui a réalisé Passion, pour la délectation à voir ce film, à le peindre... ». La préface a été opportunément demandée à un grand spécialiste de l’esthétique du cinéma, Jacques Aumont, qui commente avec beaucoup de clarté et de subtilité les allées et venues entre la peinture (La Petite Baigneuse d’Ingres) et le cinéma (photogrammes tirés du film Passion de Jean-Luc Godard) qui ont abouti aux trois versions de La Petite Baigneuse par Boisrond (2009-2011). Une femme nue, très belle, vue de dos, sur le point de s’asseoir, comment cela peut-il se peindre au début du XXIe siècle ? Godard avait sa solution pour filmer le mouvement fugitif, ce geste que Boisrond veut retrouver. Comment fait-il ? Jacques Aumont l’explique.
« ...pour cela il a eu la simple et extraordinairement féconde intuition qu’il devait recourir à un intermédiaire (un « médium ») : la reproduction du film sur DVD. La reproduction numérique d’un film, avec tous ses inconvénients (la fameuse « froideur » souvent reprochée au numérique par les thuriféraires de la pellicule), offre l’énorme avantage d’être traitable… » Finalement, ayant décidé de plagier avec humour des plans d’un film qui plagiait la grande peinture, Boisrond va jusqu’au bout, et se met dans la peau d’un metteur en scène de peinture. Le peintre est par ailleurs présenté avec justesse comme un « expérimentateur ludique » (ça n’exclut évidemment pas le caractère fondamentalement sérieux de l’entreprise) qui vient de réaliser une « série de toiles qui transposent des images de film préalablement traitées sur ordinateur » et qui propose au spectateur un exercice de pure délectation. La Figuration dite libre est très loin. La vraie peinture est intensément présente, et c’est François Boisrond qui la met en scène.
( www.louiscarre.fr)
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Verso n°136
L'artiste du mois : Marko Velk
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