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[verso-hebdo]
29-11-2012
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La lettre hebdomadaire de Jean-Luc Chalumeau |
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Régine Sarallier : « Rêver une toile puis la chanter... » |
Il y a encore des artistes à Montparnasse, qui ont pu résister aux appétits des promoteurs, certains sont même regroupés dans de charmants villages d’ateliers, comme celui de la Villa Gabriel (entrée 9 rue Falguière), dont les heureux occupants viennent d’organiser les 24-25 novembre une « porte ouverte ». On pouvait ainsi pénétrer chez Yasmine Moti, Laurence Simon, Jacqueline Manuel, Anouchah Aryana et Régine Sarallier en toute liberté. Chez cette dernière en particulier, les visiteurs pouvaient découvrir les recherches en cours du peintre, qui semble abandonner les pigments pour rassembler des écorces de palmier qui forment de mystérieux reliefs sur la toile, laquelle n’a reçu qu’un « fond de peinture ». L’artiste a en effet décidé cet été de laisser la nature brute s’emparer de son œuvre, mais l’on voit bien que c’est plutôt elle qui s’empare de la nature avec un instinct très sûr, même si elle déclare n’être pas encore tout à fait satisfaite des résultats. Elle cherche, et ne prétend pas avoir déjà adopté ce qui pourrait être un tournant dans son œuvre : c’est pourquoi elle a laissé aux murs quelques uns de ses tableaux des douze dernières années, par exemple le très beau Eclaboussures (2001) qu’elle va envoyer au prochain Salon Comparaisons (dans le cadre de « Art en capital », au Grand Palais du 27 novembre au 2 décembre, dont l’invité d’honneur est cette année Bernard Rancillac).
Ce tableau est exemplaire de la démarche de Sarallier qui est notamment une grande coloriste. Quand elle choisit sa gamme, décide de l’importance des couleurs, soit en modulant (en jouant sur les valeurs du clair à l’obscur) soit en modelant (en multipliant les touches de teintes diverses du chaud au froid et non plus du clair à l’obscur), elle nous semble le plus souvent retrouver les préceptes des peintres qui ont le plus fortement pensé leur art, tel Rubens proposant « pour un tiers de teintes lumineuses, deux tiers de teintes neutres.» Par la couleur, la lumière est partout chez Sarallier : il me semble qu’aucun de ses tableaux n’échappe à cette donnée, de telle sorte que la lumière est l’unité qui rend possible l’harmonie. Elle est l’a priori sensible de l’œuvre, la condition de possibilité d’un mouvement. C’est ce qui frappe au contact d’Eclaboussures dans l’atelier de la Villa Gabriel. Ce tableau, comme ceux qui l’environnent, demande au regard du spectateur de s’animer, faute de quoi il lui manquerait quelque chose. On entre dans le mouvement intérieur par lequel l’œuvre se rassemble pour apparaître et lancer son chant : chant funèbre parfois, mais plus souvent chant exprimant la joie et l’ivresse (Evanescence, Ciel d’Afrique, Eclaboussures…)
« Rêver une toile puis la chanter avec une voix chaude et souple comme détachée du monde » a écrit Régine Sarallier. Si telle est son ambition artistique, alors nous pouvons affirmer qu’elle a atteint son but. Peut-être même l’a-t-elle atteint au-delà de ce que cette artiste discrète, qui jamais n’a cherché à se mettre en avant alors que plus de 500 toiles s’accumulent dans la réserve de son atelier, ne veut bien admettre. Celle qui a peut-être davantage fréquenté les déserts (ceux de Jordanie et de Tunisie, d’où elle a ramené les sables qu’elle mélange à ses pigments) que les antichambres des décideurs culturels reste encore à découvrir. Elle a su construire une œuvre qui constitue en elle-même une rare leçon de peinture. Une belle leçon, en vérité, dont on aura une première idée en allant voir son tableau du prochain Salon Comparaisons. ( www.artactif.com/sarallier)
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Verso n°136
L'artiste du mois : Marko Velk
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