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[verso-hebdo]
11-02-2010
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La lettre hebdomadaire de Jean-Luc Chalumeau |
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Les formes primordiales d’Aliska Lahusen |
Le Réseau Ferré de France a pris l’heureuse initiative d’inviter dans son espace « Station 13 » (92 avenue de France 75013) neuf artistes installés dans l’arrondissement d’origines diverses (Japon, USA, Venezuela etc…) jusqu’au 9 avril. Parmi ces artistes, je note particulièrement la présence de la polonaise Aliska Lahusen qui me paraît porter au plus haut niveau la réalisation d’une idée simple : les différences autrefois établies entre art et design n’ont aujourd’hui plus de sens. Les deux sphères s’interpénètrent désormais de telle sorte qu’aucune des deux ne saurait prévaloir sur l’autre. Là où se situe Aliska Lahusen, l’art est design et le design est art.
C’est ce qu’a magnifiquement démontré, en 2009, l’exposition du Musée Manggha d’art et technologie japonais installé à Cracovie, dédiée à Lahusen sous le beau titre d’ « impermanence ». Ce mot s’expliquait dès l’apparition d’une somptueuse huile sur plomb (le plomb est l’un des matériaux fétiches de l’artiste) intitulée Lithra-Barque. Il s’expliquait d’abord par le témoignage de l’auteur, particulièrement lumineux : « Dans les mythologies, lits et barques sont souvent associés ou confondus car l’un et l’autre évoquent le départ. Certes, la mort est sans doute le premier grand voyageur, cependant mes Barques sont porteuses de vie et appellent vers l’ailleurs, un ailleurs qui peut être intime. » Mais pourquoi avoir placé le mystérieux mot lithra devant « barque » ? Aliska Lahusen, qui a un atelier en Bourgogne, a été en effet frappée par la lithre, trait noir qu’elle a parfois observé dans les églises médiévales de la région. Ces larges rubans de peinture noire barraient, en signe de deuil, les parois des édifices, recouvrant sans distinction les fresques et peintures qui pouvaient s’y trouver.
Elle en a tiré des remarquables séries sur plomb, mais elle s’en est également souvenue en figurant sa Barque comme un long bandeau sombre. Les exemples foisonnent d’emprunts par Aliska Lahusen de formes primordiales (le design avant la lettre) pour les intégrer au monde spécifique de l’art : la forme du bol par exemple, dont elle a fait des séries de peintures et de sculptures sur plomb. Ici encore, le meilleur commentaire est celui de l’artiste : la couleur blanche confère aux bols « un immatériel équilibre. Ils trouvent leur origine dans un voyage à travers l’Himalaya où j’avais été touchée par le geste d’un bol d’offrande que l’on tend pour accepter un don. J’y ai vu une symbolisation de l’ouverture à l’autre et au monde. » Ces derniers mots me semblent les meilleurs pour caractériser tout l’œuvre de Lahusen, empreint de beauté et de gravité.
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Verso n°136
L'artiste du mois : Marko Velk
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