En forme de boutade, prononcée avec la légèreté d’une évidence, l’avertissement tombe, inattendu, au détour d’une conversation, variant selon les circonstances :
 « Oh, je ne suis pas graveur, je fais de la gravure. »
ou alors :
« Je ne suis pas peintre… », «  Je ne suis pas sculpteur… »
ou bien encore :
« Je ne suis pas photographe, je fais des photos… »
Si elles n’étaient prononcées que pour provoquer son interlocuteur, on serait tenté de mettre ces précautions oratoires sur le compte d’une coquetterie d’artiste.
Il se trouve qu’elles arrivent le plus souvent à un moment choisi, et qu’elles sont adressées, tôt ou tard, à tous ceux, semble-t-il, qui font la démarche de porter sur son œuvre un regard attentif.
Force est de reconnaître alors que les mots ont un sens, et qu’il faut s’y pencher.
Car à l’évidence, Groborne est un peintre, il est un graveur, il est un sculpteur, il est un photographe.
Plus exactement, sa formation lui a permis de maîtriser autant qu’il est possible chacune de ces techniques ; il suffit de considérer l’une ou l’autre de ses œuvres pour s’en convaincre…
… et dans le même temps, pour être saisi d’un doute : les choses seraient-elles vraiment aussi simples que cela ? Devant telle nappe liquide, l’idée de la peinture s’impose, bien sûr, mais tel noir sillon n’évoque-t-il pas la gravure ? Telle coulée minutieusement modulée la sculpture ?
Telle trame ombreuse le recours à un procédé photographique, voire même informatique ?
Si donc Groborne est peintre, graveur, sculpteur, photographe, il est capable de l’être dans le même geste – et dans l’oubli du geste.
Pour le dire autrement, se définir comme peintre, ou graveur, ou sculpteur, ou photographe devant une surface blanche ne lui est d’aucun secours.
Dans ces circonstances, le savoir faire n’est à prendre en compte que dans la mesure où il contribue à l’émergence de la forme, au prix de mille tâtonnements ; lui qui s’impose une stricte discipline et un rythme de travail régulier aime dire aussi : « Oh, je n’ai pas fait grand chose ces derniers jours… »