Cuisine tatare et descendance, Alice Bronsky, traduit de l’allemand par Isabelle Liber, Actes Sud, 336 p., 25 €.

C’est l’histoire d’une jeune fille prénommé Sulfia qui n’a pas été gâté par la nature, elle n’est ni belle ni gracieuse, elle a les jambes arquées et se retrouve pourtant enceinte. Sa mère est désespérée et fait tout pour qu’elle puisse avorter. En vain. Un beau jour de 1978, naît une fille que sa grand-mère veut nommer Aminat comme sa propre mère, une femme tatare.
Sulfiat trouve du travail comme infirmière après avoir finit ses études et elle finit par épouser le père de son enfant. Le mari, Boris, travaille au Komsomol est un communiste pur et dur. Sulfia va avoir une relation avec un Juif, Rosenbaum, qui part avec sa famille en Israël, puis parvient en Allemagne où elle épouse un médecin. Le vilain petit canard a finalement fait son chemin, en débit de ses origines profondes dans les steppes de l’Asie centrale. C’est un livre un peu cousu de fil blanc, mais qui fonctionne néanmoins, car l’auteur sait faire rire de ses personnages sans les rendre caricaturaux.

« A », première partie, Louis Zukofsky, Eric Pesty Editeur, 8 p., 9 €.

Louis Zukovsky (1904-1978), créateur de l’objectivisme américain connaît un drôle de destin éditorial en France : son œuvre est publiée ces derniers temps avec une belle constance, mais toujours par des éditeurs discrets et difficiles à repérer, et toujours avec de minces extraits. C’est encore le cas avec ce volume, qui nous présente la traduction d’une de ses œuvres les plus importantes, « A ». Le caractère intriguant de ces pages est que le poème ne paraît avoir de sujet, mais est composé de relations multiples avec des objets spécifiques, qui prennent formes et intensités à la fin de ces digressions qui donne le sentiment d’être sans suite. C’est en réalité une reconstruction par le langage qui est des plus impressionnants.

Paradise, Peter Uhlman/Lucrezia Di Domizio, Electa, 128 p., 45 €.

Peter Ulham, né en 1935, poète et artiste de la Suisse alémanique, a déjà publié plusieurs recueils. Mais ce livre-ci est exceptionnel par sa présentation (un beau format à l’italienne, cartonné) et par la qualité de la mise en page et des reproductions. Cela est dû en grande partie au goût, au discernement et à l’instinct de Lucrezia Di Dominizio, qui présente ce créateur, mais s’est aussi chargé de composer l’ouvrage. Comme Peter Uhlman est sensible aux plantes, qu’il sait évoquer à merveille dans des poèmes concis, mais aussi par des dessins très fins, très sensibles, presque abstraits, les pleines pages sont présentées comme des planches de livre de botanique, sur feuille transparente parfois, et avec une incroyable qualité dans le rendu des tons pastels. Et out est accompagné de citations de Joseph Beuys, car Per Uhlman a dessiner le coco de mer (cocos nucifera) que l’artiste allemand avait utilisé lors de son séjour aux Seychelles en 1980 et qu’il avait planté symboliquement comme il plantait les chênes en Europe. C’est là sans doute une des plus belles réussites éditoriale dans ce genre.