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[verso-hebdo]
16-02-2012
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La lettre hebdomadaire de Jean-Luc Chalumeau |
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Tyszblat, la peinture et le jazz |
L’exposition en cours de Michel Tyszblat à la galerie du Centre (jusqu’au 31 mars) est intitulée « Jazz » ; elle constitue un exemple particulièrement intéressant des relations que peuvent entretenir musique et peinture. Il ne s’agit évidemment pas de représenter des musiciens (le Concert Champêtre selon Titien et Giorgione…) ou des instruments de musique (La Guitare de Juan Gris…) mais bien de traduire picturalement un rythme, comme s’y est essayé magistralement un Klee qui croyait à la correspondance des arts. Certains tableaux portent même des noms de musiques, comme les deux (l’un achevé, l’autre pas) que Mondrian intitula Broadway Boogie-woogie (1943) et Victory Boogie-woogie (1944). Victory Boogie-boogie marque la mort de Mondrian et le début de l’évolution de la peinture d’après guerre. Vingt ans plus tard, Michel Tyszblat, lui-même excellent praticien du piano-jazz, prendrait part à cette évolution à sa façon, aussi bien au clavier que devant son chevalet. Le boogie-woogie est, on le sait, une manière pianistique d’interpréter le blues, il a connu son moment de gloire dans les années 40, au moment où Mondrian chercha à le traduire en peinture, mais il est demeuré source d’inspiration jusqu’à nos jours (This is the life de la jeune écossaise Amy Macdonald en est une preuve). En 1968, Tyszblat peindrait notamment Gepetto chez les pastilles, tableau faisant immédiatement penser à Victory Boogie-woogie, typique d’un artiste peignant musicalement.
En regardant les tableaux de l’exposition, alternativement construits sur fond blanc (So what) et sur fond noir (North West passage, All the things you are…) à moins que ne se combinent dans la même œuvre le fond noir et le fond blanc (The lady is a tramp) je songeais aux mots que Pierre Boulez écrivait en 1974 à propos de Kandinsky (je transpose) : « Les toiles de Tyszblat ne se laissent pas si aisément appréhender. Vous pouvez longtemps les regarder : elles ne trahiront leurs secrets qu’au fur et à mesure de votre imprégnation. Vous vous promenez dans ce paysage imaginaire ; vous allez et venez selon l’itinéraire inspiré auquel vous conduiront un choix déterminé ou une influence sous-jacente. Certes, vous ne demeurerez plus prisonnier d’une réalité, aussi transposée soit-elle ; la pensée de Tyszblat infléchit votre pensée, vous introduit dans son dédale... » Il faut entrer dans le dédale de Michel Tyszblat, d’où émergent, çà et là, des contrebasses et des calebasses, des saxos et des autos, des pianos et des oiseaux…
Je relis un entretien que j’avais eu avec Michel à l’occasion de sa rétrospective de 2005 à la Villa Tamaris de La Seyne sur Mer (où Robert Bonaccorsi recevra Jazz en mai prochain). Et je m’aperçois que j’ai raison de me référer à Kandinsky, guidé par Boulez : évoquant l’ensemble de son œuvre, et passant en revue ses influences, Tyszblat disait que, plutôt que Cézanne, il verrait davantage un rapport avec Kandinsky, « qui en tout cas dans sa période pré-géométrique, procède de façon gravitationnelle en faisant tournoyer des formes autour d’un centre originel. » Allez donc rue Pierre-au-lard ces jours-ci, ou à La-Seyne-sur-Mer en mai : vous verrez de joyeux tableaux qui procèdent de façon gravitationnelle en faisant tous tournoyer des formes autour d’un centre. Ces tableaux paraissent improvisés, mais il s’agit de la sorte d’improvisation précise que pratique l’adepte du piano-jazz. « J’attaque au pinceau. Une forme en engendre une autre. Ce sont toujours des éléments sur un fond qui s’engendrent les uns les autres... »
( www.galerie-du-centre.net)
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Verso n°136
L'artiste du mois : Marko Velk
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