Garouste le Père-turbé
par Jean-Paul Gavard-Perret
Gérard Garouste (avec Judith Perignon),
L’intranquille , L’Iconoclaste, Paris,
168 pages, 30 Euros
Celui qui se définit comme « peintre, et fou parfois » a eu l’impression de commencer sa vie « enfermé dans un bocal » et condamné à se taper la tête contre les murs sans rien comprendre. Cancre et mal dans sa peau, Garouste ne savait que dessiner. Et très tôt il est victime d’hallucinations : « Le jour de mon bac, j’ai entendu une voix qui me disait : « Tu n’écriras pas. » Je l’ai évidemment raté. Je l’ai vécu comme un terrible échec ». Très vite l’artiste se sent incapable d’affronter le monde des adultes et à partir de son adolescence l’artiste traverse de longues périodes maniaco-dépressives. Cette maladie conduit certains à développer des tendances suicidaires mais chez lui cela dériva en délires. « Le délire est une fuite. On préfère se croire mort, ou juste un enfant, c’est une manière de se jeter dans le vide quand, justement, on a peur du vide » constate Garouste.
Il a subi en conséquence divers thérapies en vogue au fil du temps. Principalement: la camisole chimique des cocktails neuroleptiques. Comme Artaud l’artiste connu à Villejuif. Mais l’hôpital Sainte-Anne l’a le plus marqué. Ecoutons l’artiste en parler : « Sainte-Anne est beaucoup plus moderne mais il manque les vieilles cours et les platanes. J’y ai croisé des malades guéris qui refusaient qu’on les remette en liberté, à tel point qu’ils faisaient le mur à l’envers ». Garouste lui-même s’est souvent senti plus en sécurité dans les hôpitaux psychiatriques ou en pension que dans la vie « libre ». « Pour moi, la sortie des hôpitaux psychiatriques n’était pas une libération mais une punition ». Elle durerait encore sans l’amour et certains livres.