Exposition Lanneau et Nalbandian, au CIAC Château de Carros (06), du 30 juin au 28 octobre 2012. Commissariat : Sophie Braganti.
Exposition de F.Nalbandian à Mont-Dauphin et Les Vigneaux dans le Briançonnais, Quatre, commissairiat : Bernadette Clot-Goudart, association Voyons-voir du 29 juin au 16 septembre 2012.
Une proposition sensuelle
Frédérique Nalbandian donne de la saveur au savon, restitue au plâtre sec son onctuosité initiale, intègre l’eau à des pièces souvent créées in situ. L’action de l’eau et de l'air sciemment étudiée, presque scientifiquement, fait de ce travail un « work in progress » ; la pièce se transforme au fil du temps, des lieux, des températures. Les sculptures en extérieur sont souvent éphémères ou vouées à la « récupération ». Une sorte de travail en circuit ouvert / fermé. A quoi s'ajoute depuis peu, le jeu des transparences et des lumières dans l'intégration du verre.
La citation attribuée à Lavoisier ne trouve pas mieux son objet qu’ici : « Rien ne se crée, rien ne se perd, tout se transforme ». De même la référence constante au poète Francis Ponge: " Il y a beaucoup à dire à propos du savon. Exactement tout ce qu'il raconte de lui-même jusqu'à disparition complète, épuisement du sujet. Voilà l'objet même qui me convient".
L’artiste propose d’élaborer des jeux de passage avec les éléments du bâti du Musée. Elle s'appuie également sur l’architecture du lieu avec ses décors, travaille à partir des médaillons dans l’escalier, transfert d’ombres, jeu des installations avec la pente inclinée du toit, réponses aux moulures, au fresques et aux bas-reliefs existants. Puis comme en écho aux tondos de Lanneau, elle accroche ses bâches et ses bacs à savon sphériques qui, d'une situation horizontale passent à la verticalité des murs.
Entre les deux œuvres, l’eau des installations au savon de Marseille et le flamboiement des toiles rayonnantes, une complémentarité s’opère sous forme de dialogue. Les sens sont fortement sollicités. Excités ou apaisés. De même en termes de couleur : dans la peinture, les couleurs oscillent entre incandescence, tourbillons, explosions vives et jubilation puis vertige serein des blancs des sculptures et des rosés incarnés, des jaunes et du noir. Les sculptures, réalisées par moulage ou modelage (colonnes de seaux, de poubelles, puis visages, mains, cerveaux, oreilles, roses…), ont la couleur de la peau, la cendre, le goudron. La couleur de l’effacement que Nalbandian pratique par l’action systématique de l’eau. La non-couleur parle de l'absence. En même temps qu'une chose disparaît, une autre apparaît et se révèle. Pour ne parler que des roses plâtrées, momifiées dans la matière blanche, ainsi immortalisées, il ne reste en apparence que leur contour. Le souvenir de la rose nous conduit à sa couleur, sa chair saisie dans le feu de l'action. Les corps fossiles de Pompéi. La petite histoire.