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[verso-hebdo]
17-02-2021
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La lettre hebdomadaire de Jean-Luc Chalumeau |
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Fury, Data World Welcome in Dystopia |
Il y a quinze ans, Fury était connue comme une flamboyante pop artiste, elle qui avait été l'égérie du groupe Bazooka dans les années 70, elle qui avait su intégrer sa culture pop plutôt joyeuse dans une lucide et parfois douloureuse conscience des malheurs de son temps. Proche de Gilles Deleuze, elle avait adopté une phrase ironique de lui qu'elle m'avait laissé prendre pour titre d'un livre sur les « Nouveaux pop » : « Quoi de plus gai que l'air du temps ? » Dix ans plus tard, ça ne s'était pas arrangé : elle en témoignait dans une exposition stimulante présentée par Régis Estace dans sa galerie de la rue Amelot. On voyait des images et des matières évoquant la confusion du monde, avec partout la présence muette d'une jeune fille, innocente et nue, de type peut-être asiatique, qui évoquait irrésistiblement l'enfant vietnamienne brûlée au napalm dont la photo avait fait le tour du monde pendant la guerre du Vietnam.
Aujourd'hui, dans un nouvel espace sous l'égide de Mark Hachem (44 rue des Tournelles, jusqu'au 13 mars) Régis Estace accroche des oeuvres de Fury appartenant à trois séries. D'abord, à gauche Facing the End. Le tableau a été commencé en 2016 et terminé en 2020. Il est constitué de sérigraphies manuelles (comme dans la période pop de Fury) et de projections à la bombe sur toile dans de subtiles variations en rose. L'artiste a utilisé le pochoir pour faire apparaître une silhouette d'adolescente en forme d'ombre. Corps fragile, volatile, qui anime une très mince couche picturale. Puis devant le visiteur qui entre dans la galerie, trois numéros de la série en cours, donc réalisée en pleine pandémie, que Fury a baptisée Corona Blues. Nous retrouvons des profils d'adolescentes, obtenus à la bombe sur tissu à motif de damier. Les silhouettes se croisent sans se toucher dans leur univers virtuel, celui du data symbolisé par l'infini motif à damier. Il y a aussi, à côté, Data World, Why do you think I'm fake ? : toujours le tissu en damier, sur lequel la silhouette de la jeune fille s'est statufiée : elle semble devenue le pion d'un jeu d'échec.
Enfin, à droite, le mur est occupé par une installation de petites toiles : Behin Data. Notre vie numérique, les DATA, est traduite par ces petits formats (15 x 15 cm) : sur fonds de damiers, des visages féminins fragmentés apparaissent, figés, ne traduisant aucun sentiment. Fury nomme ces apparitions plus virtuelles que réelles ses « Data Madones ». Allusion mélancolique à ses Madones de 2016, symboles de pureté et d'innocence, qui déjà apparaissaient en danger. La Madone aux corbeaux en particulier, était menacée par les oiseaux noirs. Cinq années ont passé, et tout ce que l'artiste a pressenti de plus sombre est en train de se réaliser. Les virus et leurs variants, les privations de liberté dans un univers quotidien de plus en plus virtuel sont bien plus graves qu'un vol angoissant de corbeaux. Fury est cette artiste qui réussit à le traduire dans des images impeccables d'un point de vue technique et superbes d'un point de vue plastique. L'air du temps est plus triste que jamais. C'est vrai. Mais il y a des artistes comme Fury capables de s'en emparer pour nous le rendre supportable. Ils ne sont pas nombreux.
www.dominiquefury.com
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Verso n°136
L'artiste du mois : Marko Velk
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