par Thierry Laurent
Exemples.
C’est en 1543 que Copernic publie son célèbre ouvrage « De
revolutionibus orbium coelestium » dans lequel il échafaude
un univers héliocentrique (la terre et les planètes tournent
autour du soleil) mettant un terme à des siècles de géocentrisme,
(soleils et planètes tournent autour de notre terre, elle-même
centre de l’univers). Les équations de Copernic ont un avantage
esthétique sur celles de son devancier, Ptolémée :
elles sont plus simples, plus directes, plus sobres, en un mot plus élégantes.
Copernic parvient notamment à s’affranchir du recours aux « épicycles »,
(censés expliquer la rétrogradation des planètes) :
un système de cercles surajoutés aux orbites des planètes
et qui ressemble à une replâtrage bancal . Le recours aux épicycles
permet d’assurer un semblant d’équilibre au géocentrisme
de Ptolémée, édicté dans son maître ouvrage
, l’Almageste, publié à Alexandrie vers l’an 150
de notre ère. Mais ces épicycles ressemblent à des verrues
gangrenant un corps malade. Que Copernic ait eu au final raison contre Ptolémée
n’est pas ce qui nous intéresse ici. L’important est que
Copernic apporte des solutions autrement plus élégantes à l’esprit
que les vilains épicycles ptolémaïques. Dans l’ordre
du « beau », Copernic l’emporte sur Ptolémée.
Les trajectoires des planètes donnèrent lieu à de nouveaux
calculs par l’illustre Kepler, qui substitua aux cercles des parcours
en forme d’ellipse. Les travaux de Kepler furent publiés dans
son traité « Astronomia Nova », datant
de 1609. Notons que c’est en termes d’ esthétique que fut
d’abord critiquée la théorie de Kepler. L’ellipse était
jugée comme une forme imparfaite, dévaluée, bancale, comparée à la
pureté conceptuelle du cercle. Mais l’ellipse, comme trajectoire
des planètes, contribue à simplifier les calculs mathématiques.
Non seulement les lois de Kepler décrivent la trajectoire des planètes
avec un surcroît d’exactitude, mais on peut parler d’un progrès
esthétique : en effet les lois de Kepler décrivent les trajectoires
des planètes autour du soleil avec un surcroît d’élégance,
en ce sens qu’elles sont simples, sobres, efficaces, y compris sur le
plan visuel.
Cette notion de pure esthétique des mathématiques a été théorisée
par Guillaume d’Ockham, un théologien franciscain anglais du XIV° siècle,
sous l’appellation de Rasoir d’Ockham, principe selon lequel, entre
deux explications concurrentes, la plus sobrement élégante est
forcément la plus exacte. C’est dire qu’en science le vrai
procède du beau.