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[verso-hebdo]
20-10-2022
La lettre hebdomadaire
de Jean-Luc Chalumeau
Actualité de Dubuffet
Dans son nouvel et vaste espace du 5 rue Saintonge dans le 3ème, la galerie Jeanne Bucher Jaeger organise une rétrospective Jean Dubuffet, « Le Cours des choses » en hommage à Jean-François Jaeger (disparu le 26 décembre 2021) qui défendit l'artiste pendant quarante ans. Cette « biographie au pas de course » est remarquable à plusieurs titres, et d'abord parce qu'elle comporte des oeuvres de chacun des cycles de travaux exposés par la galerie depuis 1964. Elle a beaucoup été saluée par la presse, c'est pourquoi je ne m'arrête que sur un point qui a son importance : un présentoir et une vitrine mettent en valeur l'oeuvre écrite de Dubuffet par laquelle il défendait vigoureusement ses conceptions de l'art. Dubuffet écrivain voulait convaincre, ce qui justifie son « style de notaire » comme il disait. On ne lutte pas contre la culture en s'adressant aux laissés-pour-compte de la connaissance : c'est donc au contraire le public « cultivé » que le défenseur de l'art brut voulait persuader de l'inanité de la « culture ».

« Je m'adresse aux instruits dans leur langage - leur libellé de notaire, que je me suis appliqué à utiliser tout au long de ces notes pour me faire entendre d'eux. » Les Prospectus et tous écrits suivants s'ouvrent par des « notes pour fins lettrés » qui contiennent entre autres la savoureuse parabole du peintre en bâtiment, toujours merveilleusement informé des pouvoirs des couleurs et de leurs variations selon les supports sur lesquels elles sont appliquées, opposés à la vanité des tenants de la peinture « soi-disant artistique », qui ne savent pas que le matériau est un langage. Si Dubuffet écrit, c'est qu'il en a par-dessus la tête de la condescendance des écrivains à l'égard des artistes. Notre « culture » s'est construite depuis des siècles sur l'idée que les fins lettrés ont le monopole de l'expression de la pensée, les artistes n'étant que des espèces d'infirmes cantonnés à un rôle d'ornementateurs et d'illustrateurs soumis aux règles et jugements des écrivains qui, en France plus qu'ailleurs, se sont fait reconnaître un rôle d'experts en toutes choses et notamment en peinture.

Contre les prétentions des écrivains, Dubuffet place donc lui-même son oeuvre de peintre sous le signe du logos - son propre logos - qui n'a rien à voir avec ce que racontent les philosophes de la vision. Non pas la vision, en effet, mais la voyance. Le peintre, selon Dubuffet, n'a que faire de ce qu'il voit et son travail n'est pas de le transcrire : bien plus intéressante est l'appréhension de ce que le peintre désire voir. « Le peintre, en somme, tout à l'opposé de peindre ce qu'il voit, comme le lui prête certain public mal informé, n'a de bonne raison qu'à peindre ce qu'il ne voit pas mais qu'il aspire à voir. » La peinture est là pour provoquer la pensée, ou mieux : la voyance. Préparez vous donc à visiter l'exposition après avoir lu Asphyxiante culture (1968). Vous serez peut-être armé pour comprendre. (jusqu'au 19 novembre)

www.jeannebucherjaeger.com
J.-L. C.
verso.sarl@wanadoo.fr
20-10-2022
 

Verso n°136

L'artiste du mois : Marko Velk

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Christophe Cartier au Musée Paul Delouvrier
du 6 au 28 Octobre 2012
Peintures 2007 - 2012
Auteurs: Estelle Pagès et Jean-Luc Chalumeau


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D'une main peindre...
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Christophe Cartier

"Rêves, ou c'est la mort qui vient"
édité aux éditions du manuscrit.com