Qu'est-ce qu'un livre d'art ? Les libraires rangent ce genre d'ouvrage dans leurs rayons « beaux livres ». Donc le livre d'art est d'abord réputé beau. Il comporte nécessairement beaucoup d'illustrations en couleurs de haute qualité et il doit présenter un texte bien écrit, de préférence par un auteur réputé. Ces caractéristiques sont exactement celles du dernier ouvrage de Sophie Nauleau : L'Académie équestre de Versailles. C'est édité par Gallimard dans sa collection Découvertes, mais attention, c'est un « hors série ». C'est pourquoi ce beau livre n'est pas grand et lourd comme par exemple un catalogue d'exposition dans un musée : il est petit au contraire (15 x 20 cm, 76 pages), mais construit sur le principe des pages dépliantes, ce qui permet de mettre à contribution vingt-cinq photographes qui ont suivi depuis vingt ans les spectacles de Bartabas, sujet central du livre. Dès l'ouverture de la page de garde, le ton est donné : il s'agit d'une étude de la jambe du cheval par Léonard de Vinci. Il s'agit bien d'un livre d'art pour la somme de 14, 50 euros !
Sophie Nauleau, directrice artistique du Printemps des Poètes est une passionnée de cheval, elle a déjà publié La Vie cavalière chez Gallimard et, aux éditions Actes Sud, La Voie de l'Ecuyer, premier livre de référence sur l'Académie équestre de Bartabas. Ce dernier, en préfaçant le livre, nous prévient : il n'y est pas principalement question de lui (« le bon maître est celui qui sait se rendre inutile ») mais de ses écuyères qui, écrit-il, l'émeuvent toujours : « par un dialogue respectueux avec leur monture, avec le même entêtement et la même abnégation, elles poursuivent leur rêve, celui d'un art habité par la grâce et la légèreté ». Sophie Nauleau nous montre ces jeunes femmes aussi bien dans le travail quotidien des soins aux chevaux que dans leurs magnifiques spectacles dans le manège Versaillais et ailleurs. Elle nous donne leurs noms et celui de leurs superbes lusitaniens d'origine ibérique : Charlotte Tura et Matisse, Marie Lesnard et Arlequ'un, Anna Kozlovskaya et Passa Di Sotto... Elles pratiquent aussi bien l'escrime artistique que l'arc japonais.
Sophie Nauleau observe qu'elles sont aussi sveltes que les lusitaniens sont ronds. « Leur culotte d'équitation à fond de peau s'accorde au gris du tapis. Tandis que leur veste de lin vieilli signée Dries Van Noten se décline aux couleurs de l'automne, lointain souvenir de cavalerie, que rehaussent aux manches quelques broderies à l'indienne. Une étoffe de soie rayée vient ceindre les hanches et parfaire ce raffinement cavalier. » Vous l'aurez compris : ces écuyères servent à la perfection la chorégraphie équestre, aussi bien dans l'écrin du manège de Versailles que dans d'autres sites d'exception, « un art sublime et sans conteste. » Oui, un art sublime, auquel viennent s'associer de grands artistes. Sophie Nauleau cite notamment les cas du pianiste Alexandre Tharaud venu jouer du Bach parmi les chevaux, ou le chorégraphe new yorkais Larrio Ekson venu danser Les Juments de la nuit... Oui, en vérité, un exceptionnel livre d'art qui offre réellement, selon la vocation de la collection, de passionnantes découvertes.
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